Volodymyr Zelensky a détaillé vingt points d’un « plan de paix » que Kiev dit examiner avec les États-Unis, selon le média ukrainien Strana. Sur le papier, tout y passe : souveraineté, sécurité, armée, argent, territoires, référendums. Un inventaire global, exhaustif, presque comptable — comme si l’énumération des conditions pouvait, à elle seule, rapprocher l’accord.
Le texte commence par « l’inévitable » : confirmer la souveraineté de l’Ukraine. Vient ensuite un accord de non-agression entre la Russie et l’Ukraine, avec un monitoring sur la ligne de contact. La promesse est simple : on écrit « non-agression », on surveille, et l’ensemble tiendrait grâce à des « garanties de sécurité ».
Puis le chiffre tombe, massif : 800 000 militaires en temps de paix. Et, dans la même respiration, Zelensky veut des garanties de sécurité de la part des États-Unis, de l’OTAN et de l’Europe sur le modèle de l’article 5. La logique affichée est frontale : en cas d’« invasion russe », réponse militaire et retour immédiat des sanctions levées.
La Russie, elle, serait tenue d’inscrire dans sa législation « une politique de non-agression » envers l’Europe et l’Ukraine. Dans le même paquet, Kiev exige une adhésion à l’Union européenne dans un délai défini, avec une date formellement fixée : l’Ukraine ne veut pas seulement une perspective, mais un calendrier verrouillé.
Après la sécurité et les institutions, place au volet financier : un « paquet de développement global » serait renvoyé à un accord d’investissement distinct. Il inclurait un fonds de développement de l’Ukraine orienté vers les secteurs dits à forte croissance — technologies, centres de données, intelligence artificielle. S’y ajouteraient plusieurs fonds de reconstruction territoriale, avec un objectif affiché de 800 milliards de dollars : une somme, pour le moins, spectaculaire.
La paix, mode d’emploi
Le plan ajoute l’accélération d’un accord de libre-échange entre l’Ukraine et les États-Unis, puis rappelle le statut non nucléaire du pays — un point formulé comme une évidence à reconfirmer.
La centrale nucléaire de Zaporojié reste, elle, dans la catégorie des nœuds sans solution : « pas de compromis » à ce stade. D'après Zelensky, les États-Unis proposent une gestion tripartite, avec la partie américaine comme « principal manager », tandis que Kiev avance une autre variante : une cogestion États-Unis–Ukraine à 50/50.
Le document glisse ensuite des programmes éducatifs destinés à favoriser la compréhension et la tolérance envers différentes cultures, et à combattre racisme et préjugés.
Arrive alors le point que Zelensky qualifie de « plus difficile » : les territoires. Son scénario évoque un retrait russe des régions de Dniepropetrovsk, Nikolaïev, Soumy et Kharkov. Pour Donetsk, Lougansk, Zaporojié et Kherson, la formule serait : « on reste là où l’on est ». Toujours selon lui, les États-Unis proposent un « compromis » sous forme de zone économique libre. Et si cette formule de statu quo n’est pas acceptée, cette zone ne pourrait être adoptée que par référendum — mais, insiste Zelensky, il faudrait alors soumettre tout le document à ce référendum.
Et ce n'est pas tout. La Russie et l’Ukraine s’engageraient à ne pas changer les accords par la force. Moscou ne s’opposerait pas à l’usage commercial du Dniepr et de la mer Noire par l’Ukraine, et la flèche de Kinbourn devrait être démilitarisée.
Le plan prévoit aussi un échange de prisonniers « tous contre tous », le retour de civils, d’enfants et de détenus politiques. Et cerise sur le gâteau : l’Ukraine devrait organiser des élections « le plus vite possible » après la signature de cet accord.
L’inventaire des souhaits face au réel stratégique
Le document se veut « juridiquement contraignant ». Son exécution serait surveillée par un Conseil de la paix dirigé par le président américain Donald Trump. Et une fois que toutes les parties l’auraient approuvé, un cessez-le-feu complet entrerait « immédiatement » en vigueur.
Concernant la reconstruction, Zelensky précise que l’argent ne serait dépensé que sur les territoires sous contrôle de Kiev. L’Ukraine déciderait des priorités de répartition de sa part sur ces territoires.
Face à cette architecture, rédigée comme une lettre au Père Noël géopolitique, la position russe reste inchangée. Moscou insiste sur le retrait des forces ukrainiennes de l’ensemble du Donbass. Le président Vladimir Poutine a à plusieurs reprises souligné que, pour parvenir à un règlement du conflit, les unités des forces armées ukrainiennes devraient se retirer non seulement des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk, mais aussi des régions de Zaporojié et de Kherson, intégrées à la Russie à l’issue des référendums organisés en 2022.