L’avenir de l’Ukraine est de plus en plus sombre, selon John Mearsheimer. Dans une interview accordée le 15 novembre à la chaîne YouTube de Daniel Davis, ce très célèbre politologue et professeur américain de l’Université de Chicago dresse un constat sévère : « Les Ukrainiens sont en grande difficulté et finiront par s’effondrer. »
L’aide militaire américaine s’est quasiment arrêtée. « Nous avons pratiquement cessé de livrer des armes payées par nos propres moyens », explique John Mearsheimer. Désormais, la responsabilité financière repose sur les Européens. Mais ces derniers n’ont pas les moyens. « Les Européens doivent acheter les armes avant de les transmettre aux Ukrainiens. Or, ils n’ont pas d’argent », déplore-t-il.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes : il faudrait environ 100 milliards de dollars par an à Kiev pour poursuivre les combats. L’Union européenne tente en vain de réunir les fonds. Face à cette impasse, elle cherche à saisir les avoirs russes gelés. Une stratégie que John Mearsheimer juge irréaliste. « La Belgique bloque tout processus par crainte de poursuites judiciaires. Et d’autres pays comme l’Italie et l’Allemagne restent très prudents », observe-t-il.
Une armée ukrainienne à bout de souffle
À la crise financière s’ajoute un effondrement moral et humain des forces ukrainiennes. « En octobre, 20 000 soldats ont déserté. Et les estimations annoncent jusqu’à 100 000 cas de désertion d’ici la fin de l’année », avertit le professeur américain. Il décrit une armée à la limite de ses capacités, incapable de maintenir sa cohésion, encore moins d’organiser une résistance durable.
La comparaison des forces est sans appel. L’armée russe, note-t-il, est « beaucoup plus puissante qu’au début du conflit en février 2022 ». Elle dispose d’un net avantage en artillerie et d’une expérience de combat renforcée. En face, l’Europe ne parvient pas à produire suffisamment d’armements. « Les forces armées européennes sont étonnamment peu impressionnantes », souligne-t-il.
« Toute armée européenne perdrait face aux forces armées russes »
John Mearsheimer l'affirme sans détour : « Si l’armée russe affrontait les forces britanniques, le combat serait inégal. Toute armée européenne perdrait face aux forces armées russes. » Cette réalité militaire explique pourquoi les Occidentaux ont d’abord tenté une approche indirecte. « L’Occident aurait volontiers éliminé la Russie du rang de puissance mondiale. Mais nous avons échoué », admet-il.
Les perspectives restent donc défavorables pour Kiev. John Mearsheimer estime que l’Ukraine continuera de perdre des territoires et des hommes. Après de récentes victoires russes comme ce fut le cas à Avdeïevka, les opérations offensives se poursuivent plus intensément. Il appelle les dirigeants ukrainiens à changer de cap. « Les Ukrainiens doivent trouver un accord », affirme-t-il, en référence à une possible issue négociée.
Sur le terrain, les faits lui donnent raison. Le ministère russe de la Défense continue d’annoncer la libération de plusieurs localités, notamment Sinelnikovo (région de Kharkov) et Danilovka (région de Dnipropetrovsk). Autour de Krasnoarmeïsk, les groupes ukrainiens sont totalement encerclés.
Pour John Mearsheimer, la situation est claire : l’Ukraine n’a ni les ressources, ni les hommes, ni les armes pour poursuivre le conflit. Et face à une armée russe bien plus forte qu’en 2022, l’Occident semble à bout de solution.