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L'armée nigérienne accusée d'avoir «massacré» des dizaines, voir «des centaines» de chiites

Au moins 60 personnes ont été tuées ce week-end lors d’un raid de l’armée nigérienne visant une minorité chiite. Son leader, Ibrahim Zakzaky a aussi été arrêté, causant la colère de l'Iran et du dignitaire chiite irakien Moqtada al-Sadr.

L’armée a déclaré que le Mouvement Islamique au Nigéria (MIN) essayait d’assassiner le chef d’état-major de l’armée, le lieutenant général Tukur Buratao, lorsque des membres du MIN ont bloqué son convoi à Zaria samedi. Les militants chiites célébraient un rituel annuel pour le mois de Mawlid, le mois de naissance du prophète Mohammed.

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Dimanche, l’armée a investi plusieurs bâtiments connectés au mouvement, ainsi que le domicile de son leader, Ibrahim Zakzaky. Ils l’ont arrêté et tué plusieurs membres du groupe, dont le porte-parole Ibrahim Usman. «Nous avions hier 60 corps à la morgue», a déclaré Khalid Lawal, directeur de l’hôpital universitaire Ahmadu Bello. Il a ajouté que 28 autres personnes avaient été blessées. Mais Chifi Odinkalu, de la Commission pour les Droits de l’Homme du Nigéria, a lui déclaré que l’armée nigérienne avait tué des centaines, voir peut être jusqu’à 1 000 musulmans chiites, qualifiant l’opération de «massacre».

Lundi soir, le général-major Adeniyi Oyebade, basé à Kaduna, a déclaré qu’il y avait des blessés des deux côtés, sans donner de chiffres. Il a ajouté qu’Ibrahim Zakzaky était en garde à vue, avec sa femme. Mais le Mouvement Islamique au Nigéria affirme que des centaines de ses membres ont été tués. L’armée ayant emporté la plupart des corps, il est impossible de vérifier cette affirmation. Néanmoins, un reporter de Reuters s’est rendu sur place lundi, et y a vu des rues maculées de sang, ainsi que les trois bâtiments de l’organisation détruits. La résidence du leader était criblée de balles. Des témoins ont déclaré que les militants chiites se défendaient avec des arcs et des flèches.

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Le dignitaire religieux chiite Moqtada al-Sadr a, dans un communiqué, vivement condamné cette attaque, qu’il a qualifié de «terrorisme d’Etat». «Le gouvernement [nigérian] se met à employer les méthodes de l’Etat islamique en tuant des chiites innocents» a-t-il affirmé dans un communiqué. «Attaquer des soutiens désarmés du Cheikh Zakzaky, l’arrêter preuve de culpabilité, juste parce qu’ils sont des opposants… Où sont la liberté et la démocratie ?», a-t-il poursuivi, avant d’appeler à des «manifestations de masse» dans les régions où se trouvent des chiites, et de demander aux organes internationaux à agir pour «mettre un terme à ce genre d’attaque». L'Iran a aussi condamné l'attaque.

La plupart des dizaines de millions de musulmans au Nigéria sont sunnites, y compris les djihadistes de Boko Haram, qui ont tué des milliers de personnes lors d’attentats et de fusillades, principalement dans le nord-est du pays, depuis 2009. Mais il y a aussi quelques milliers de chiites, suivant pour la plupart Zakzaky, dont le mouvement est inspiré de la révolution islamique iranienne de 1979

Une altercation similaire avait eu lieu l’année dernière durant une procession, causant la mort selon le leader du MIN, de 30 chiites et de trois de ses enfants.

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