Russie

Sabotage des gazoducs Nord Stream : en Russie, la version du groupe de plongeurs ne convainc pas

Deux ans après le sabotage des gazoducs Nord Stream, les responsables russes ne sont pas convaincus par les récentes affirmations de la presse occidentale quant à une opération menée par des plongeurs ukrainiens. Dans un communiqué, le renseignement extérieur russe a affirmé avoir de nouvelles informations confirmant l'implication des Anglo-Saxons.

«Il s'agit d'une affaire sur l'implication de grands États dans l'organisation et la mise en œuvre de cet acte de sabotage», a déclaré ce 26 septembre Dmitri Peskov, répondant à une question sur les résultats de l’enquête sur l’explosion des gazoducs Nord Stream survenue deux ans plus tôt jour pour jour. Le porte-parole du Kremlin a notamment renvoyé à des informations du Service russe de renseignement extérieur (SVR).

Plus tôt dans la journée, celui-ci avait en effet publié un communiqué affirmant continuer à «collecter des informations sur les circonstances». Les Occidentaux, non seulement, n'ont pas «mené d’enquête, mais tentent également d’en fabriquer les résultats», pointe le communiqué. Des informations «confirmant ce qui a déjà été exprimé par le directeur du service Sergueï Narychkine sur l’implication des Anglo-Saxons dans ces incidents», a poursuivi le SVR.

Dans la foulée de ces explosions, qui avaient coupé net cette voie d’acheminement du gaz russe vers l’Europe – particulièrement décriée à Washington et Varsovie –, Sergueï Narychkine avait déclaré que le SVR disposait «déjà des documents indiquant la piste occidentale dans l'organisation et la mise en œuvre de cette attaque terroriste». Attaque dont le haut responsable russe estimait alors que l’Occident faisait «tout pour cacher les véritables auteurs et organisateurs».

Un commando comprenant «des plongeurs civils», affirmait cet été le WSJ

«Les renseignements disponibles indiquent clairement que les attaques contre les pipelines constituent un acte de terrorisme international et de guerre économique des Anglo-Saxons contre leurs alliés européens, en premier lieu l'Allemagne», a poursuivi le SVR dans son communiqué publié ce 26 septembre.

«Les enquêtes menées en Allemagne, au Danemark et en Suède n'ont pas abouti à des résultats concrets. Notre pays n'a pas été autorisé à prendre connaissance de l'évolution de l'affaire, retardant autant que possible le processus pour cacher les preuves», a quant à lui fustigé, dans un message posté sur Telegram, le président de la Douma Viatcheslav Volodine. «Il ne servira à rien de rejeter la faute sur un "groupe pro-ukrainien" et des plongeurs civils», a-t-il par ailleurs estimé, soulignant le nombre de «versions exprimées» dans les causes de cette attaque.

Mi-août, plusieurs médias allemands, dont la chaîne de télévision publique ARD et le journal Süddeutsche Zeitungavaient avancé que trois instructeurs de plongée ukrainiens auraient été impliqués dans le sabotage des gazoducs et qu’un mandat d'arrêt européen avait été émis par le parquet fédéral allemand, plus tôt dans l’année, contre l’un d’entre eux.

Dans la foulée, le Wall Street Journal (WSJ) avait rapporté que l’opération aurait impliqué «un petit yacht de location avec un équipage de six membres, dont des plongeurs civils expérimentés». Le WSJ pointait vers l’ancien commandant en chef de l’armée ukrainienne Valeri Zaloujny, qui selon le quotidien américain, n’aurait pas obéi à Volodymyr Zelensky, qui aurait donné l’ordre d’annuler l’opération après une demande de la CIA.

«Pour comprendre qui est à blâmer, nous devons examiner qui en profite»

«Washington et Biden sont personnellement à l’origine de l’explosion du Nord Stream. Il lui était avantageux de priver l’Europe occidentale du gaz russe bon marché, l’obligeant à l’acheter aux États-Unis à des prix exorbitants», a accusé Viatcheslav Volodine.

Même tonalité, du côté de Berlin, où l’ambassadeur russe Sergueï Nechaev a également taclé les dernières révélations des médias occidentaux. «Selon la version qui circule, une certaine équipe de plongeurs sur une goélette a posé une quantité colossale d'explosifs à une profondeur considérable et a complètement fait exploser un gazoduc. Cette version est difficile à croire. Elle est plus susceptible de divertir que de convaincre», a-t-il déclaré dans une interview à RBK publiée dans la nuit du 25 au 26 septembre.

«Presque immédiatement après, la partie polonaise a exprimé sa gratitude à ceux qui l'avaient fait», a-t-il ajouté, dans ce qui semble être une allusion au message posté sur X (ex-Twitter) par le député européen Radosław Sikorski, depuis revenu à la tête de la diplomatie polonaise. «Pour comprendre qui est à blâmer, nous devons examiner qui en profite. Par exemple, étudiez qui fournit actuellement du gaz naturel liquéfié à l’Allemagne à des prix gonflés et réfléchissez-y», a-t-il conclu.

Mi-août, le chef de la diplomatie russe avait notamment dénoncé la pusillanimité allemande face à cette attaque contre ses intérêts. «Il est honteux pour l’Allemagne d’accepter en silence qu’elle ait été privée de sa base de prospérité énergétique et économique à long terme. Pendant de nombreuses décennies, cela a été la clé de son développement sous la forme d’un approvisionnement stable en gaz russe à des prix raisonnables» avait déclaré Sergueï Lavrov au micro d’Izvestia, estimant «clair» que Washington ait ordonné le sabotage.