Il y a trois ans, le 15 août 2021, les talibans entraient victorieux à Kaboul, récupérant le pouvoir qu'ils avaient perdu 20 ans plus tôt, dans la foulée d'une retraite américaine chaotique. La guerre en Afghanistan, lancée en 2001, a été la plus longue de l'histoire des Etats-Unis.
Pour fêter l'événement, les dirigeants afghans ont organisé une journée de célébrations qui sera marquée par un défilé militaire dans l'immense base de Bagram, ancienne base des troupes américaine, et un rassemblement populaire dans la capitale. La sécurité a été renforcée pour l'occasion.
En trois années de règne sur l'Afghanistan, les maîtres de Kaboul ont réussi à sortir de leur isolement en nouant des relations diplomatiques avec les pays limitrophes en Asie centrale, à l'instar du Pakistan et de l'Iran, mais également en entretenant des liens avec la Russie, la Chine, les Émirats arabes unis et le Qatar.
Le petit émirat du golfe Persique se distingue par la présence d'un bureau politique taliban dans son pays depuis 2013. Doha a été le théâtre des négociations entre les talibans et les Américains en février 2020, ouvrant la voie au retrait complet des États-Unis l'année suivante.
D'ailleurs, le 30 juin dernier était organisée une réunion à Doha sous l'égide de l'ONU en présence d'une délégation des talibans. Les discussions ont notamment abordé le soutien économique et la lutte antidrogue avec la communauté internationale. Selon l'ONU, la culture de pavot de l'ex-premier producteur mondial a en effet chuté de 95% entre 2022 et 2023, entraînant de fait de nombreux agriculteurs et fermiers dans la pauvreté. Cette drogue était une des principales ressources du pays avant l'arrivée du mouvement islamiste.
«L'Afghanistan est sorti de l'isolement»
Lors de cette réunion, le porte-parole en chef du gouvernement taliban, Zabihullah Mujahid, qui dirigeait la délégation, a déclaré que cette rencontre était une nouvelle preuve que l'Afghanistan était «sorti de l'isolement». Les autorités afghanes font toujours pression sur les Nations unies pour récupérer leur siège. «Actuellement, nous entretenons de très bonnes relations avec les pays voisins, régionaux et musulmans», a déclaré Zabihullah Mujahid, ajoutant qu'environ 40 pays avaient des ambassades ou des consulats en Afghanistan.
Parmi ceux-ci, la représentation chinoise. En septembre 2023, Pékin a nommé Zhao Sheng comme nouvel ambassadeur dans le pays.
Moscou se veut réaliste
La Russie, qui a maintenu son ambassade à Kaboul, a annoncé retirer les talibans de la liste des organisations terroristes. Ce retrait reflète, selon le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, la «réalité objective», les talibans représentant en effet «le pouvoir réel» en Afghanistan. «Nous devons, d'une manière ou d'une autre, maintenir des relations avec eux», a de son côté jugé Vladimir Poutine le 28 mai.
Les nouveaux maîtres de Kaboul restent néanmoins isolés de la communauté occidentale qui refusent d'entretenir des relations avec les talibans.
Le réel problème pour les talibans reste le défi sécuritaire posé par la branche de l'État islamique dans la région. Le groupe sévit également en Iran, au Pakistan et dans plusieurs pays d'Asie centrale. Comptant près de 6 000 membres, Daech commet régulièrement des attentats sur le sol afghan, notamment contre la minorité chiite des Hazaras. En mai dernier, l'organisation terroriste a revendiqué une attaque contre un groupe de touristes, tuant trois Espagnols et trois Afghans.
L'État islamique au Khorasan a aussi été impliqué dans l'attentat du Crocus Hall à Moscou en mars dernier, qui a coûté la vie à 145 personnes, Moscou ayant de surcroît pointé l'implication des services ukrainiens.
La prise de pouvoir des talibans le 15 août 2021 avait donné lieu à des scènes de panique à l'aéroport de Kaboul, les soldats américains se précipitant sur le tarmac pour quitter les lieux et la foule tentant de monter sur les ailes des avions qui décollaient.