«La Commission n'a pas donné au public un accès suffisamment large aux contrats d'achat de vaccins contre le Covid-19», a souligné le 17 juillet la Cour de justice de l’UE qui s'est prononcée sur la gestion des contrats d'achats de vaccins par la Commission européenne au cours de la pandémie de Covid-19. Dans deux arrêts, cette institution établie à Luxembourg, qui avait été saisie par un groupe d'eurodéputés ainsi que par des particuliers, a donné partiellement raison aux plaignants.
Ceux-ci avaient réclamé en 2021 à cet organe exécutif européen d’accéder aux documents leur permettant de comprendre les termes et conditions des achats et de «s'assurer que l'intérêt public était protégé», stipule le communiqué de la cour.
Parmi les «irrégularités» soulignées par cette dernière, figure le refus «partiel» de divulguer les déclarations d'absence de conflit d'intérêts des négociateurs européens de ces achats. Le tribunal de l’UE a estimé que connaître leur identité et leur parcours professionnel était d’«intérêt public». Les juges européens ont également pointé du doigt certaines clauses des contrats, restées confidentielles, concernant des indemnisations et d'éventuels dommages et intérêts dus par les laboratoires en cas de défaut de leurs vaccins.
Une victoire partielle pour les partisans de la transparence
«Environ 2,7 milliards d'euros ont été débloqués afin de passer une commande ferme de plus d'un milliard de doses de vaccin» après l’arrivée en Europe début 2020 de la pandémie du Covid-19. Plus de la majorité des doses achetées ou réservées le furent auprès du duo américano-allemand Pfizer/BioNTech, alors que cinq autres fabricants avaient vu leurs vaccins être homologués par le régulateur européen (AstraZeneca Janssen, Moderna, Novavax et Valneva).
Le tribunal a toutefois confirmé le bien-fondé d'un accès restreint du public à bon nombre de clauses des contrats, notamment celle mentionnant les lieux de production des vaccins. La Commission, qui peut encore former un pourvoi devant la Cour de justice de l'UE, a souligné n’avoir été condamnée que «sur deux points».
«Cette victoire, c'est grâce à Michèle Rivasi», a déclaré sur X (ex-Twitter) l’une des plaignantes, l’eurodéputée écologiste Jutta Paulus, en hommage à sa collègue française. Michèle Rivasi, figure des écologistes et de la lutte anti-lobbies, également plaignante dans cette affaire, est soudainement décédée à Bruxelles en novembre 2023.
«Pfizergate» : l'affaire des SMS reste en suspens
«La transparence ne se négocie pas, elle doit être le ciment de la démocratie !», a pour sa part déclaré Manon Aubry, coprésidente du groupe The Left (gauche radicale) au Parlement européen, demandant le report du vote concernant la réélection d'Ursula von der Leyen à la tête de la Commission.
Cette affaire éclaboussant l'actuelle présidente, pressentie pour être reconduite pour un second mandat de cinq ans à la tête de la Commission européenne, n’est pas la seule dans le cadre de la gestion de la crise du Covid-19. Le parquet européen a en effet ouvert, en octobre 2022, une enquête concernant les achats controversés de vaccins. Une vive polémique avait éclaté, un an plus tôt, à la suite des révélations du New York Times concernant un échange de SMS entre Ursula von der Leyen et le PDG de Pfizer Albert Bourla.
Dans la foulée de ces révélations, face au refus du secrétariat général de la Commission européenne de transmettre les fameux «SMS et autres documents» ayant mené à la signature de ce contrat de plusieurs milliards d’euros à un journaliste du site allemand Netzpolitik.org, la médiatrice de l’Union européenne Emily O’Reilly avait critiqué l'attitude de l'exécutif européen.