Russie

Lavrov : la crise ukrainienne, «un test pour l'ordre mondial multipolaire émergent»

Ce 30 janvier, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a rencontré les chefs des missions diplomatiques à Moscou. Il a dénoncé l'obsession occidentale d'infliger une défaite stratégique à la Russie via l'Ukraine, et l'impasse de la «formule Zelensky».

«La crise ukrainienne est, dans l'ensemble, un test pour l'ordre mondial multipolaire émergent», a déclaré Sergueï Lavrov ce 30 janvier, devant les chefs des missions diplomatiques russes. Un test qui amène selon lui la majorité mondiale à «réaliser de plus en plus l'inutilité de s'appuyer uniquement sur les mécanismes de la vie internationale qui ont été créés par l'Occident collectif».

Pour le chef de la diplomatie russe, pas de doute : l’Occident entend maintenir son «seul but» de «poursuivre la rapine coloniale, néocoloniale et de vivre aux dépens des autres», l’Ukraine lui servant à «infliger une défaite stratégique de la Russie».

L’histoire radote, selon Sergueï Lavrov, évoquant les précédents historiques des guerres napoléoniennes, quand «toute l'Europe était unie sous la bannière de Napoléon  pour attaquer notre pays», et de la Seconde Guerre mondiale, quand «pratiquement tous les pays européens» ont suivi Hitler contre l’URSS. «Vous savez comment cela s'est terminé», a prévenu le ministre russe.

«Les États-Unis ont réuni 54 pays dans un camp qui fournit des armes à l'Ukraine», a souligné Sergueï Lavrov, fustigeant les déclarations occidentales actuelles sur la menace qui pèserait sur les pays Baltes, la Suède et la Finlande si la Russie l’emportait en Ukraine. «L'absurdité de telles déclarations est évidente pour tout le monde», a balayé le ministre russe, en appelant à une compréhension de l’action de son pays.

200 milliards en deux ans à l'Ukraine

«Nous éliminons une injustice historique, nous éliminons les tentatives de réécrire l'histoire des peuples de notre pays», a-t-il fait valoir, ajoutant le refus de Moscou de voir «transformer ces territoires en une tête de pont de l'OTAN, dirigée par les États-Unis, pour menacer la sécurité de la Fédération de Russie».

L’obsession occidentale en Ukraine saute aux yeux, selon le diplomate : «L'Occident en faillite a alloué plus de 200 milliards de dollars en deux ans à l’Ukraine. En comparaison, l'Union européenne a budgétisé moins de 80 milliards de dollars pour le soutien socio-économique des États du Sud et de l'Est en sept ans. À l'Afrique 30 milliards de dollars, à l'Asie-Pacifique 8, à l'Amérique latine 3,5».

Le complexe militaro-industriel américain profite du conflit

Un financement d'autant plus «cynique», selon lui, que les États-Unis ont renforcé dans cette vaste opération leur complexe militaro-industriel : «Plus de 60% des armes achetées par les pays de l'UE sont de fabrication américaine.»

Des armes utilisées selon lui dans les frappes du 30 décembre contre la ville russe de Belgorod, ayant causé 25 morts civils, et du 21 janvier à Donetsk, qui a vu 28 morts civils, mais aussi contre l’avion Il-76, abattu le 24 janvier par Kiev alors qu’il transportait 65 prisonniers de guerre ukrainiens.

Une tragédie qui ne verra pas d’enquête internationale, pense Sergueï Lavrov : «[Les Occidentaux] n’aiment pas les enquêtes internationales», a-t-il taclé, rappelant que les demandes de la Russie d’enquêter sur l’explosion du Nord Stream n’avaient pas été entendues.

Le ministre russe des Affaires étrangères a par ailleurs dénoncé les tentatives de convaincre plusieurs pays de remettre «rapidement» des armes de fabrication russe à l’Ukraine «sans rien dire» à la Russie. Or, en vertu du contrat de vente, «le destinataire de l'arme ne peut la revendre, la détourner où que ce soit sans l'accord du pays fournisseur». La Russie est «en contact avec les pays en question», a prévenu Sergueï Lavrov.

L'impasse de la «formule Zelensky» voulue par l'Occident

Face à ces accumulations, la paix voulue en Ukraine par l’Occident apparaît de surcroît impossible aux yeux du ministre russe, qui a dénoncé la formule de paix du président Zelensky.

Cette formule, en dix points, correspond aux seules exigences de Kiev. Parmi ces points, notamment, Kiev exige le contrôle de tous les territoires sur lesquels il estime être souverain ainsi que des réparations.

Elle a été une nouvelle fois discutée à Davos en présence de 84 pays et organisations, bien que ce processus révèle avant tout selon Sergueï Lavrov «le mépris accordé à d’autres solutions», notamment celle de la Chine ou des pays africains, initiée à l’été 2023 par l’Afrique du Sud. «On leur dit... il n'y a que la formule Zelensky, c'est un manque de respect», a commenté le chef de la diplomatie russe. «Voyez avec quelle véhémence les Anglo-Saxons défendent l’absence d’alternative à la formule de Zelensky.»

Et celui-ci de rappeler, pour conclure, «le grand principe de la charte de l'ONU, qui dit que les Nations unies sont fondées sur l'égalité souveraine des États».