Deux rapports publiés ce 7 décembre par Amnesty International et Human Rights Watch appellent à une enquête pour crime de guerre à l'encontre de l'État hébreu suite à deux frappes menées contre un groupe de journalistes au Liban le 13 octobre dernier.
Frappes qui «constituent probablement une attaque directe contre des civils qui doit faire l’objet d’une enquête en tant que crime de guerre», note dans son enquête Amnesty International, estimant qu'il n'y avait aucune preuve «indiquant la présence de combattants ou d'objectifs militaires sur le site des frappes».
«Un hélicoptère Apache israélien, et probablement un drone israélien, ont plané au-dessus d’eux pendant plus de 40 minutes avant la première frappe», souligne le rapport. «Les forces israéliennes disposaient de tours d’observation, d’éléments terrestres et de moyens aériens déployés pour surveiller de près la frontière», poursuit l'ONG. «Tout cela aurait dû fournir suffisamment d’informations aux forces israéliennes sur le fait qu’il s’agissait de journalistes et de civils et non d’une cible militaire.»
Même son de cloche du côté de l'ONG Human Rights Watch, qui précise que «les deux frappes israéliennes au Liban le 13 octobre 2023, qui ont tué le journaliste de Reuters Issam Abdallah et blessé six autres journalistes, constituaient une attaque apparemment délibérée contre des civils». L'organisation non gouvernementale indique que les journalistes étaient «clairement identifiables en tant que membres des médias».
Des dizaines de journalistes tués au Proche-Orient depuis le 7 octobre
«Les responsables présumés doivent rendre des comptes, et il doit être clair que les journalistes et les autres civils ne sont pas des cibles légitimes», a déclaré Ramzi Kaiss, chercheur sur le Liban à Human Rights Watch. «Ce n’est pas la première fois que les forces israéliennes attaquent délibérément des journalistes», a assuré ce dernier.
L’AFP, dont deux journalistes ont été blessés, notamment la photographe Christina Assi, 28 ans, grièvement atteinte, qui a subi une amputation de la jambe droite, a également enquêté. «Ces sept semaines d'investigations, menées conjointement avec le collectif britannique d'experts et d'enquêteurs indépendants Airwars, montrent qu'un obus de char de 120 mm stabilisé par des ailettes, exclusivement utilisé par l'armée israélienne dans la région, est à l'origine de la frappe» ayant tué Issam Abdallah, précise l’agence de presse française.
«Je sais que ces enquêtes ne ramèneront pas Issam, je sais qu'elles n'aideront pas Christina à marcher à nouveau», a déclaré ce 7 décembre le vidéojournaliste de l'AFP Dylan Collins, lors d’une conférence de presse organisée à Beyrouth par HRW et Amnesty. «Mais j'espère qu'au moins, elles marqueront le début d'un cheminement vers la justice et la reddition des comptes», a ajouté le vidéojournaliste, lui aussi blessé dans le même bombardement.
Depuis le début du conflit entre le Hamas et l'armée israélienne, 63 journalistes et professionnels des médias ont été tués en Palestine, au Liban ainsi qu'en Israël, selon le dernier décompte du Comité pour la protection des journalistes (CPJ). Le 21 novembre dernier, alors qu'ils couvraient les tensions au Sud-Liban, deux journalistes de la chaîne libanaise Al-Mayadeen, Farah Omar, 25 ans et Rabih Maamari, 39 ans, ont été tués avec un contributeur du média dans une frappe israélienne.
De surcroît, Human Rights Watch avait appelé les soutiens d'Israël et des groupes armés palestiniens à suspendre leur assistance militaire. Amnesty International appelle régulièrement à la mise en place d'un cessez-le-feu ainsi qu'à la fin des fournitures d'armes américaines à l'État hébreu. D'après une enquête publiée le 5 décembre par Amnesty International, des armes américaines ont été utilisées par l'armée israélienne pour frapper des civils.