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Canada : le président de la Chambre des communes démissionne après l'ovation d'un vétéran nazi

Vent de panique sur Ottawa après une découverte pour le moins embarrassante : le vétéran ukrainien invité lors de la visite de Zelensky faisait en réalité partie de la tristement célèbre division SS Galicie, connue pour ses nombreux massacres.

[Mise à jour : le Premier ministre Justin Trudeau a finalement présenté ses excuses au Parlement canadien, le 27 septembre 2023.]

Le président de la Chambre des communes du Canada a annoncé le 26 septembre sa démission après le scandale provoqué par l'hommage rendu au parlement à un vétéran ukrainien ayant combattu avec les nazis pendant la Seconde guerre mondiale, à l'occasion de la visite de Volodymyr Zelensky.

«C'est avec le cœur lourd que je me lève pour informer les membres de ma démission en tant que président de la Chambre des communes», a déclaré Anthony Rota devant le parlement, parlant de «ses profonds regrets pour son erreur».

Ses propos faisaient suite à la révélation du passé de Yaroslav Hunka, 98 ans, un résident de sa circonscription qu'il avait convié le 22 septembre au Parlement à l'occasion de la visite du président ukrainien en le présentant comme «un Canadien ukrainien, vétéran de la Seconde Guerre mondiale qui a combattu contre les Russes pour l'indépendance de l'Ukraine». Il avait été ovationné par le Parlement canadien. 

Une séquence que Volodymyr Zelensky s'est, de son côté, retenu de commenter sur X (ex-Twitter), alors que le président ukrainien et son épouse, tout comme Justin Trudeau, peuvent être aperçus applaudissant Yaroslav Hunka.

La polémique avait éclaté lorsqu'une organisation juive canadienne, le Centre des amis de Simon Wiesenthal, dans un post sur X daté du 24 septembre, s'était dite «consternée que le Parlement canadien fasse une ovation à un vétéran ukrainien qui avait servi pendant la Seconde Guerre mondiale dans une unité nazie impliquée dans le meurtre de masse de Juifs et de non-Juifs». Elle avait exigé des «excuses et des explications».

Trudeau nie avoir été mis au courant 

Suite à cette tempête médiatique, le 24 septembre au soir, le président de la Chambre des communes a «présenté ses excuses les plus sincères aux communautés juives partout au Canada et autour du monde» et a dit assumer «l’entière responsabilité de ses actes».

«Je tiens à préciser que personne parmi mes collègues parlementaires ou parmi la délégation ukrainienne n’était au courant de mes intentions ou de mes remarques avant mon allocution», a-t-il précisé, insistant sur le fait qu'il était «le seul responsable de cette initiative, l’individu en question étant une personne de ma circonscription dont on [lui] avait parlé».

Le cabinet du Premier ministre a confirmé ses dires, se dédouanant de la responsabilité de cet incident. Dans des propos rapportés par Radio Canada, il a conclu que «[les excuses de Rota] étaient la bonne chose à faire».

De manière prévisible, les critiques du gouvernement, n'ont pas manqué d'en faire leurs choux gras : le chef de l'opposition, Pierre Poilievre, y voyait sur X une «grave erreur de Justin Trudeau», tandis que le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchette, jugeait cette situation «désolante».

De l'autre côté de l'Atlantique, le journaliste britannique au Daily Mirror David Atherton raillait sur X la vidéo des excuses de Rota, notant que son cabinet «s'y connaissait en LGBT mais pas en histoire».

Un tollé en Russie et en Pologne

Une fois n'est pas coutume, Moscou et Varsovie ont partagé la même indignation contre cet événement. L'ambassadeur russe à Ottawa, Oleg Stépanov, a annoncé plus tôt ce 25 septembre l'envoi d'une «note exigeant des éclaircissements» au ministère canadien des Affaires étrangères et au cabinet du Premier ministre. Il estimait notamment qu'en rendant hommage à un membre d'une «telle organisation criminelle», le cabinet du Premier ministre et les parlementaires canadiens avaient dépassé «non seulement les normes morales mais aussi juridiques».

«Il est révoltant de voir le chef d'état major canadien Wayne Eyre avec ses collègues à épaulettes applaudir un bourreau SS», a-t-il ajouté, soulignant que, par cette action, «le régime de Trudeau insult[ait] l'histoire du Canada et les Canadiens qui ont donné leur vie pour libérer le monde du nazisme dans le cadre de la coalition anti-hitlérienne».

Il a en outre indiqué «se poser beaucoup de questions» sur la présence lors de cette ovation des ambassadeurs français, anglais et américain.

L'ambassadeur de la Pologne au Canada, Witold Dzielski, a quant à lui réagi sur X en demandant des excuses au gouvernement canadien, affirmant que cette unité a été responsable de la mort de milliers de Juifs et de Polonais.

Le 22 septembre, le président ukrainien se rendait en visite officielle au Canada après son déplacement la veille aux Etats-Unis. Le gouvernement canadien lui a alloué une nouvelle tranche d'aide d'un montant de 650 millions de dollars «sur trois ans visant à fournir à l'Ukraine 50 véhicules blindés». Ils ont également discuté des «besoins de l'Ukraine sur les plans financiers, de l'aide au développement, de l'aide humanitaire et autres». A cette occasion, le Premier ministre canadien a réaffirmé que «le Canada restera[it] aux côtés de l’Ukraine et lui fournira[it] toute l’aide nécessaire, aussi longtemps qu’il le faudra[it]».