«Les perspectives d'une résolution politico-diplomatique de la crise sont actuellement assez floues», a jugé l'ambassadeur de la Russie au siège de l'ONU à Genève, tant «Kiev et ses gestionnaires occidentaux» continuent «de s'appuyer sur l'usage de la force militaire».
«La Russie laisse la porte ouverte», a néanmoins tenu à rappeler Gennady Gatilov dans une interview au quotidien Izvestia, publiée ce 3 juillet. Le diplomate russe accuse les soutiens de Kiev, poussés par leur espoir d’infliger à Moscou «une défaite stratégique», de rejeter toute initiative pouvant mener à la paix en Ukraine. Il évoque notamment le récent rejet, par Kiev, de l’initiative de paix portée par une ambassade de chefs d’Etat africains.
Kiev parie sur sa contre-offensive
Mi-juin, Volodymyr Zelensky avait en effet refusé toute négociation avec Moscou lors de la tentative de négociation menée par les chefs d'Etat africains, alors que l'armée ukrainienne est engagée depuis plus d'un mois dans une contre-offensive difficile sur le front. Le 1er juillet, le Washington Post a révélé que le directeur de la CIA, William Burns, s'était rendu à Kiev au mois de juin. Selon le quotidien américain, les dirigeants ukrainiens ont présenté des plans pour reprendre des territoires occupés par les forces russes et entamer des négociations de cessez-le-feu d'ici la fin de l'année.
«Il ne faut pas oublier que la Fédération de Russie a initialement prôné un règlement pacifique. C'est ce que visaient les accords de Minsk», déclare notamment le diplomate. «Cependant, Kiev et ses marionnettistes occidentaux, en fin de compte, n'avaient même pas prévu de les réaliser», poursuit-il.
L’ONU, sous pression, manque d’impartialité selon Gatilov
Le représentant russe se montre également sévère à l’encontre de l’ONU, estimant que jusqu'ici l’organisation internationale «ne semble pas avoir été en mesure de se montrer comme un parti impartial».
«Le secrétariat de l'ONU et la direction de toutes les autres organisations du système des Nations unies, sous l'influence du collectif occidental, préfèrent en règle générale s'abstenir de critiquer directement Kiev, y compris pour des violations flagrantes du droit international humanitaire», estime Gennady Gatilov.
Ce dernier évoque notamment les avertissements de la partie russe afin d’empêcher la destruction, début juin, de la centrale hydroélectrique de Nova Kakhovka. «Les efforts de l'ONU sur l'Ukraine sont paralysés par la réticence à écouter notre point de vue ou tout autre», estime le diplomate, dénonçant l’attitude des Occidentaux qui «tordent, sans ménagement, le bras des autres délégations».
Autre victime potentielle de cette impossibilité d’établir un dialogue constructif entre Moscou et les chancelleries occidentales : les accords d’Istanbul. Plus connus sous le nom générique d’accord céréalier, ceux-ci arrivent à leur terme le 18 juillet et pourraient ne pas être renouvelés.
Tensions en mer Noire : les accords d’Istanbul sur la sellette
En effet, Moscou réclame toujours, dans le cadre de ces accords qui permettent aux navires ukrainiens d’aller et venir depuis leurs ports, la levée des sanctions occidentales sur ses exportations d’engrais et de produits alimentaires, la reconnexion au système Swift de sa banque agricole Rosselkhozbank, la reprise des livraisons de matériel agricole et de pièces détachées ainsi que du fonctionnement du pipeline d’ammoniac Togliatti-Odessa.
Début juin, un tronçon de cette installation a été endommagé par une explosion dans le nord-est de l’Ukraine. Les autorités russes et ukrainiennes se rejettent mutuellement la responsabilité de cette destruction. Celle-ci constitue un «sérieux coup» porté aux accords, estime le diplomate qui accuse également Kiev d'utiliser «régulièrement» les navires autorisés à croiser en mer Noire «pour lancer des drones maritimes» contre des bâtiments de la marine russe.
«La Russie a prolongé à plusieurs reprises l'accord dans l'espoir de changements positifs. Cependant, ce que nous voyons maintenant ne nous donne pas de raisons d'accepter de maintenir le statu quo», met en garde Gennady Gatilov. Ce dernier estime par ailleurs que cette initiative «positionnée comme humanitaire» aurait «dégénérée en projet commercial». «Les pays nécessiteux ne reçoivent qu'un minimum symbolique, ne dépassant pas 3%, des miettes de la table du maître», fustige ainsi le diplomate.
Volodymyr Zelensky a affirmé le 1er juillet qu'il voulait que son pays reçoive une «invitation» à rejoindre l'OTAN lors du sommet de Vilnius en juillet. «Nous avons besoin d'un signal très clair et intelligible lors du sommet de Vilnius, selon lequel l'Ukraine peut devenir un membre à part entière de l'OTAN après la guerre», a-t-il déclaré. La menace d'intégration de l'Ukraine à l'Alliance atlantique a été l'une des raisons de l'intervention russe en février 2022.