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La France rêve toujours de maintenir son «influence exclusive» en Afrique, estime Maria Zakharova

Commentant la tournée d'Emmanuel Macron en Afrique, la porte-parole de la diplomatie russe a jugé que Paris voulait toujours contrer l'influence de Moscou comme de Pékin, aux dépens de la souveraineté des pays africains.

La porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères Maria Zakharova a déclaré le 9 mars lors d'une conférence de presse que la France cherchait toujours à entraver l'influence russe comme chinoise sur le continent africain, malgré les affirmations de Paris concernant la fin de «l'ère de la Françafrique».

«Le rêve de préserver son influence exclusive en Afrique et d'en exclure les autres pays, en particulier la Russie et la Chine, est toujours d'actualité à Paris, de toute évidence», a-t-elle diagnostiqué, estimant que «la France définit toujours […] ses pays africains préférés» et qu’elle est prête à «fermer les yeux sur les coups d'Etat militaires et les nombreuses violations des droits de l'homme, tant qu'ils suivent aveuglément le cap défini par la France».

Elle faisait ainsi référence aux propos tenus le 2 mars par le président français Emmanuel Macron, qui a déclaré lors d'une visite au Gabon que l’âge de la «Françafrique» – c’est-à-dire le maintien de la tutelle informelle de Paris sur ses anciennes colonies en Afrique – était «révolu».

Les pays africains veulent une «véritable souveraineté», souligne Zakharova

D'après Maria Zakharova, cette annonce cache «une volonté triviale de camoufler l'ancienne approche consumériste à l'égard de la région» et n'aurait guère de fondements, dans la mesure où les Etats africains qui «défendent leurs propres intérêts et qui veulent diversifier leurs partenaires dans les domaines de la coopération économique, sécuritaire, culturelle» se retrouvent selon elle «soumis à une pression énorme» de la part de Paris.

Malgré les efforts de la France, «l'opinion publique africaine, la jeunesse d'aujourd'hui, et même les élites politiques de la plupart des pays africains, voient de plus en plus clairement à quel point l'attitude de Paris à l'égard de ce continent demeure contradictoire et arrogante», a-t-elle avancé. Selon la porte-parole du ministère des Affaires étrangères, les pays africains ont au contraire «gagné le droit d'être amis avec les pays» qu'ils souhaitent, et ont exprimé «leur désir de véritable souveraineté» à l'égard d'Emmanuel Macron, notamment à travers des manifestations anti-françaises tout au long de sa tournée africaine.

Alors que le président français entendait promouvoir un nouveau type de relations entre Paris et l’Afrique, sa tournée a été émaillée de plusieurs ratés. Sa visite en République démocratique du Congo (RDC) le 4 mars a ainsi été marquée par une conférence de presse tendue, alors que des éclaircissements étaient attendus à propos d'une politique française jugée trop conciliante vis-à-vis du Rwanda, accusé de soutenir la rébellion du M23 dans le pays.

«Depuis 1994, vous n’avez pas été capable de restaurer la souveraineté ni militaire, ni sécuritaire, ni administrative de votre pays», a lancé maladroitement le président français, appelant les autorités congolaises à ne «pas chercher des coupables à l’extérieur». Des propos qui ont été très fraîchement accueillis par le président congolais Félix Tshisekedi. «Regardez-nous autrement, en nous respectant, en nous considérant comme de vrais partenaires et non pas toujours avec un regard paternaliste, avec l'idée toujours de savoir ce qu'il faut pour nous», a-t-il répliqué sous les applaudissements de la presse congolaise.

Outre le chef d'Etat congolais, des organisations de la société civile et des mouvements citoyens ont reproché à la France de n'avoir pris jusqu'à présent «aucune sanction diplomatique et encore moins économique contre le régime de Kigali» et l'ont accusée de «s'illustrer par sa politique de deux poids deux mesures face à des régimes autocratiques, garants de la Françafrique, qui maintiennent leur population dans l'assujettissement»