Les débats ont été pour le moins tendus lors de la réunion du Conseil de sécurité de l'ONU organisée le 24 février – soit un an après le lancement de l'opération militaire russe en Ukraine – et portant sur le conflit.
Prenant la parole, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a déclaré, propos repris sur le site de l'ONU : «Il y a un an, je siégeais dans ce Conseil, et j’ai demandé avec insistance : "Au nom de l’humanité, ne permettez pas que commence en Europe ce qui pourrait être la pire guerre depuis le début du siècle, avec des conséquences non seulement dévastatrices pour l’Ukraine, non seulement tragiques pour la Fédération de Russie, mais avec un impact que nous ne pouvons même pas prévoir s’agissant des conséquences pour l’économie mondiale." J’ai dit à ce moment-là : donnons une chance à la paix.»
La «guerre a pris le dessus», selon Guterres
«Mais la paix n’a eu aucune chance. La guerre a pris le dessus. L’invasion russe de l’Ukraine est une violation flagrante de la Charte des Nations unies et du droit international», a-t-il encore fait valoir, en présence de nombreux ministres occidentaux, comme le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken, le secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères britannique James Cleverly ou encore la ministre de l'Europe et des Affaires étrangères française Catherine Colonna.
Cette dernière avait d'ailleurs expliqué sur Twitter dans la journée : «Cela fait aujourd'hui un an que la Russie sème la mort et la destruction en Ukraine. 365 longs jours. Au Conseil de sécurité, nous lui demandons de cesser son agression et de respecter enfin le droit international.»
Egalement présent, le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba, s'est exprimé, soulignant que, selon lui, la Russie était «le problème du monde». Il a également appelé à la création d'un tribunal spécial «ayant compétence sur le crime d'agression contre l'Ukraine», d'après le site de l'ONU. «La justice doit être rendue», a-t-il encore fait savoir.
Les représentants russes quittent la salle, dénonçant une position des Européens «dictée par Bruxelles»
De son côté, le représentant permanent de la Fédération de Russie auprès des Nations unies, Vassili Nebenzia, a pris la parole en début de réunion, regrettant que la présidence maltaise du Conseil de sécurité ait autorisé un grand nombre de ministres européens, ayant tous le même point de vue selon lui, à s’exprimer.
«De toute évidence, tous ces pays, qui s’expriment à partir d’une seule position paneuropéenne dictée par Bruxelles, n’apportent aucune valeur ajoutée à la discussion [...] Une telle approche en diminue la valeur et porte un coup à la réputation du Conseil», a-t-il estimé.
Selon l'agence de presse russe TASS, Vassili Nebenzia et le premier représentant permanent adjoint russe, Dmitri Poliansky, ont alors quitté la salle avant l'intervention des ministres européens.
Un peu plus tôt, Vassili Nebenzia avait souligné que le fait de dire, selon lui, que l'offensive russe en Ukraine avait pour objectif de «détruire» le pays ou de le «désukrainiser» n'était pas honnête et n'avait jamais été un des «objectifs» de la Russie. Il avait également rappelé que la Russie était prête à négocier «sur les moyens pacifiques de réaliser les objectifs de l'opération».
«L’Occident collectif» pas «intéressé par la fin des hostilités en Ukraine», assure Nebenzia
Après la réunion, la mission permanente russe auprès de l'ONU a mis en ligne sur son site un communiqué de presse de Vassili Nebenzia dans lequel il accuse «l'Occident collectif» de ne pas être «intéressé par la fin des hostilités en Ukraine».
«Nos collègues occidentaux sont satisfaits de l’état actuel des choses. Les Russes et les Ukrainiens s’entretuent, les entreprises occidentales productrices d’armes font des profits fabuleux et disposent d’un terrain d’essai pour les nouvelles armes», déplore-t-il encore, ajoutant que «Washington affaiblit ses rivaux européens, qui font preuve d’un degré sans précédent de servilité et d’impuissance».
Toujours selon lui, «l’Occident se frotte les mains et espère qu’en affaiblissant la Russie et en menaçant la Chine, il conservera sa position de monopole dans le monde».
Il note également que «toutes les expressions comportant le mot "paix", utilisées astucieusement, y compris aujourd’hui, par des représentants de haut rang de l’Ukraine et des pays occidentaux, impliquent en fait tout autre chose. A savoir, la capitulation de la Russie et sa défaite stratégique, idéalement, avec sa désintégration ultérieure et un redécoupage [des frontières] de ses territoires».
Enfin, il remarque que «l’Occident collectif doit accepter le fait qu’il y a d’autres acteurs sur notre planète avec leurs propres intérêts, et qu’il est nécessaire de coexister avec eux et même tout à fait possible de coopérer dans un intérêt mutuel, sur la base de l’égalité et du respect mutuel».
Pour rappel, la Russie a lancé une «opération militaire spéciale» en Ukraine le 24 février 2022. Kiev et ses alliés dénoncent, depuis, une guerre d'invasion ne répondant à aucune provocation de la part de Kiev. Les Occidentaux ont multiplié ces 12 derniers mois les sanctions économiques contre la Russie, ainsi que les livraisons d'armements à Kiev. Moscou, de son côté, a justifié son offensive militaire en invoquant, notamment, la nécessité de protéger les populations du Donbass, les autorités locales étant en conflit avec le pouvoir central ukrainien depuis le coup de Maïdan de 2014. Les autorités russes ont également dit vouloir «démilitariser» et «dénazifier» l'Ukraine et ont dénoncé la menace pour leur territoire que représente, selon elles, l'expansion vers l'est de l'OTAN.