L'influenceur et escroc de 24 ans «PA7», Paul Antony de son vrai nom, a été condamné le 6 juillet à Paris à sept ans d'emprisonnement et 80 000 euros d'amende, pour avoir organisé via les réseaux sociaux une fraude aux aides destinées aux entreprises touchées par la pandémie de Covid-19.
Le jeune homme a été reconnu coupable notamment d'escroquerie et blanchiment en bande organisée, se voyant aussi infliger une interdiction définitive de gérer une entreprise et une inéligibilité de cinq ans.
«Le tribunal a voulu faire un exemple, il en a fait un exemple», a regretté son avocate Me Carole Foissy en sortant de la salle d'audience, indiquant étudier l'opportunité de faire appel.
Le trouble à l'ordre public, économique et social est extrêmement grave
Egalement frappé de cinq ans d'interdiction de sortie du territoire, Paul Antony avait reconnu avoir organisé, à partir de mars 2020, une escroquerie au fonds de solidarité, en remplissant des formulaires falsifiés, au nom d'auto-entrepreneurs ou d'indépendants recrutés par l'intermédiaire de flyers et vidéos sur Snapchat.
Beaucoup de tentatives ont échoué mais d'autres ont fonctionné : sur l'argent public versé, il prenait alors une commission.
«Le trouble à l'ordre public, économique et social est extrêmement grave s'agissant de cette délinquance opportuniste [consistant] à piller les fonds publics par pur esprit de lucre», a déclaré le présidente du tribunal en rendant sa décision, évoquant une «délinquance extrêmement lucrative et très organisée».
Le montant du butin contesté
Alors que le prévenu contestait les montants issus des investigations, affirmant avoir en réalité touché une somme bien moindre, le tribunal a estimé qu'il était lié à près de 700 demandes frauduleuses, pour 33,8 millions d'euros réclamés et 7,5 millions effectivement versés entre mars 2020 et juillet 2021.
Soit avec une commission d'environ 40%, plus de 3 millions d'euros pour «PA7», a précisé la présidente Isabelle Prévost-Desprez.
Relevant une «absence totale de remise en cause», le tribunal a jugé que son «comportement», notamment au procès mi-juin, était «celui d'un individu profondément ancré dans la délinquance rémunératrice», avec un «risque majeur de réitération».
De la grande vie à Dubaï à la prison
«PA7», arrêté en juillet 2021 à Dubaï, était suivi par plus de 51 000 abonnés sur Snapchat et 13 000 sur Instagram.
Son casier judiciaire comportait une peine de neuf mois de prison avec sursis pour un démarchage illégal. Une partie de ce sursis a été révoqué et une sanction de deux mois pour avoir eu un téléphone portable pendant sa détention provisoire.
Le tribunal a par ailleurs conclu qu'il existait bel et bien un «réseau structuré» autour de lui, qui avait un temps «recruté une dizaine de personnes chargées de remplir les dossiers dans des bureaux à Asnières», en région parisienne. Lui était le «front office», ses coprévenus le «back office», a estimé la juridiction.
Julien M., qui avait suivi en décembre 2020 son ami à Dubaï où ils ont «flambé» pendant quelques mois, a été condamné à cinq ans d'emprisonnement et 80 000 euros d'amende, avec la même inéligibilité et interdiction de gérer.
Le tribunal a jugé que ce jeune homme de 24 ans sans casier, qui comparaissait lui aussi dans le box, avait été le «bras droit» de PA7 «à tous les stades et niveaux des faits».
Le réseau démantelé
«La peine me paraît d'une dureté extrême», a réagi son avocat Me Mourad Battikh. «La peine a vocation à être exemplaire. L'implication de mon client ne méritait pas une telle sévérité. Il s'est réinséré, a regretté cet accident de parcours. Cette peine le prive de toute voie de réinsertion à court et moyen terme». Le conseil a précisé qu'il ferait «très probablement» appel.
Pour avoir rempli des dossiers d'aides, participé à la «logistique» ou au «blanchiment» des fonds, trois hommes et une femme se sont vu infliger des peines de deux à quatre ans ferme, avec des amendes allant jusqu'à 80 000 euros. Trois d'entre eux, absents au prononcé de la décision, sont visés par des mandats d'arrêt.
Enfin, un «client» de PA7 a été condamné à six mois avec sursis. D'autres procédures se poursuivent concernant les autres bénéficiaires indus présumés.
Le tribunal a choisi des peines légèrement en-deçà des réquisitions du ministère public, qui avait notamment demandé sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende pour l'influenceur, six ans et 80 000 euros d'amende pour Julien M.