Le Parlement européen a validé le 6 juillet le label «vert» de l'Union européenne pour le gaz et le nucléaire. Le texte, présenté en janvier 2022 par la Commission, classifie comme «durables» certains investissements pour la production d'électricité dans des centrales nucléaires – qui n'émettent pas de CO2 – ou des centrales au gaz, à condition qu'elles mobilisent les technologies les plus avancées.
Et, pour ces dernières, à la condition supplémentaire qu'elles permettent de fermer des centrales à charbon bien plus polluantes. Cette classification (dite taxonomie) doit aider à mobiliser des fonds privés dans ces projets. Elle s'inscrit dans l'objectif de neutralité carbone de l'UE en 2050. Réunis en session plénière à Strasbourg, les eurodéputés ont rejeté une proposition de veto contre ce projet, à une majorité de 328 voix. L'objection a recueilli seulement 278 voix.
Colère des organisations écologistes
Le feu vert des Etats membres étant déjà acquis, les opposants ont annoncé qu'ils lanceraient une procédure en justice, seul moyen désormais disponible pour bloquer l'initiative.
«Je vous demande de ne pas rejeter ce fragile compromis négocié avec précaution», avait demandé le 6 juillet au matin le Premier ministre tchèque Petr Fiala, dont le pays vient de reprendre à la France la présidence tournante de l'UE.
«L'énergie nucléaire et le gaz provenant de pays sûrs seront les seuls moyens pour certains Etats membres d'atteindre nos objectifs climatiques communs dans les années à venir», a-t-il plaidé.
La reconnaissance de la contribution du gaz et du nucléaire à la lutte contre le changement climatique, en s'appuyant sur la base de rapports d'experts, a suscité la colère d'organisations écologistes qui dénoncent une opération de greenwashing. Le label «vert» était jusqu'ici réservé aux énergies renouvelables.
Après de premières manifestations d'organisations de défense de l'environnement le 5 juillet, quelques dizaines de militants pro et anti-nucléaire ont manifesté face-à-face le 6 juillet au matin pour interpeller les eurodéputés à leur arrivée au Parlement européen. Dans l'hémicycle, les anti-gaz avaient également donné de la voix lors d'un débat le 5 juillet.
Les eurodéputés se prononçaient sur une proposition d'objection, adoptée le 14 juin par les commissions parlementaires Affaires économiques et Environnement, synonyme de veto contre le texte de l'exécutif européen. Une majorité absolue de 353 voix était requise pour bloquer le texte de la Commission.
Les énergies renouvelables pas assez efficaces pour lutter contre les émissions de CO2
«Personne ne dit que le gaz et le nucléaire sont des énergies vertes, mais elles sont temporairement indispensables à la transition. Nous devons utiliser tous les outils pour nous passer en priorité du pétrole et du charbon», avait plaidé l'eurodéputé français macroniste Gilles Boyer (Renew). La taxonomie de l'UE «donne la priorité aux renouvelables et à l'efficacité énergétique», a rappelé la commissaire aux Services financiers Mairead McGuinness, venue défendre son texte à Strasbourg.
Mais l'exécutif européen estime que les énergies renouvelables ne pourront pas à elles seules répondre à la demande croissante d'électricité en raison de leur production intermittente. D'où le besoin, au moins à titre transitoire, de favoriser aussi l'investissement dans des moyens stables et pilotables comme le gaz et le nucléaire.
Le label «vert» à ces deux sources d'énergie a déjà reçu l'aval des Etats membres. Seuls huit pays, dont l'Allemagne, l'Autriche et le Luxembourg, ont exprimé leur opposition, lors de consultations menées par la présidence française du Conseil de l'UE, loin de la «super-majorité» de vingt pays nécessaire pour bloquer le projet. La France, qui veut conserver une filière nucléaire, et des pays d'Europe centrale comme la Pologne, qui doivent remplacer leurs centrales à charbon, sont derrière la Commission.