Selon les informations de Mediapart publiées le 7 février, alors que le garde des Sceaux était encore avocat, il aurait facturé des honoraires à hauteur de 100 000 euros à une société domiciliée aux Seychelles («l’un des plus redoutables paradis fiscaux de la planète») sans l'avoir pourtant représentée. Avec cette somme, il aurait acheté une Maserati pour plus de 95 158 euros à Monaco en 2013 avant de la revendre.
La société en question Exelyum était dirigée par un homme qui a depuis été condamné dans une affaire d'escroquerie de grande ampleur «à la Madoff». La société n'aurait dès lors servi que de «boîte noire» où aurait transité l'argent, selon le site d'investigation.
Lorsqu'un juge d'instruction a mené l'enquête sur cette affaire d'escroquerie, il se serait aperçu de la présence du nom de l'avocat dans le dossier. En tirant les fils de cet écheveau, il serait parvenu à déterminer que Jean-Pierre Nitkowski (qui dirigeait Exelyum) avait croisé en 2012 un autre détenu et «escroc présumé» en cellule à Monaco : Immanuel de Agrella, «client éphémère de Me Dupond Moretti», précise Mediapart.
Ironie du sort, ce client (bien réel cette fois) du futur ministre de la Justice n'aurait pas été satisfait des services du cabinet du célèbre avocat qui a envoyé des collaborateurs ou des associés plaider à sa place après être venu le visiter deux fois en détention. Il aurait par la suite demandé un remboursement des honoraires à Eric Dupond-Moretti.
L'enquête du juge aurait permis de déterminer que le vrai client de Dupond-Moretti, Agrella, était convenu en prison avec Nitkowski de fournir des informations boursières à ce dernier en échange du règlement des honoraires importants de l'avocat via la société basée aux Seychelles.
L'entourage du ministre botte en touche
Contacté par Mediapart, l'entourage du ministre a répondu : «L’affaire concernant la société Exelyum que vous mentionnez a été instruite par un juge d’instruction, spécialisé en matière financière, qui disposait de tous les éléments et a procédé à des investigations sans juger pour autant nécessaire d’entendre Eric Dupond-Moretti.»
Le site d'investigation conclut que le dirigeant de la société Exelyum qui a versé les 100 000 euros à Eric Dupond-Moretti a pour sa part été condamné à cinq ans de prison ferme et 150 000 euros d'amende en 2021 avec une quinzaine d'autres personnes. Dans cette affaire d'escroquerie, précise Mediapart, certaines victimes ont été «totalement ruinées».