France

Les partenaires sociaux réticents à l'idée d'instaurer un pass sanitaire en entreprise

L'idée d'étendre le pass sanitaire aux entreprises suscite de fortes réticences voire de l'hostilité au sein des organisations patronales et syndicales consultées ce 20 décembre par la ministre du travail Elisabeth Borne.

Syndicats et patronat étaient consultés le 20 décembre en fin de matinée lors d'une réunion en visioconférence présidée par Elisabeth Borne au sujet, entre autres, de l'éventualité d'étendre le pass sanitaire sur le lieu de travail. «Nous proposerons des mesures pour freiner la propagation du virus mais rien ne sera acté à l’issue [de cette réunion en visioconférence]», avait prévenu en amont l'entourage de la ministre du Travail cité par l'AFP.

Déjà controversée, cette potentielle mesure est loin d'être plébiscitée par les partenaires sociaux. Pour Bernard Cohen-Hadad, le président de la section francilienne de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), les salariés réticents à la vaccination seraient mis «en dehors de l'entreprise» et verraient leurs salaires suspendus. «C'est une perte de compétences, c'est une mauvaise ambiance dans l'entreprise, c'est de l'angoisse, c'est pas ce que nous souhaitons mais s'il faut passer par là, nous le ferons. C'est notre devoir de responsabilité», a-t-il estimé au micro de RMC le 20 décembre.

Pour l'Union des entreprises de proximité (U2P), «il faut mettre la priorité sur la continuité de l'activité. Donc si ça doit passer par un pass, pourquoi pas. Mais il ne faut pas que ce soit punitif», souligne l'organisation patronale.

«Est-ce aux chefs d'entreprise d'exercer des pouvoirs de police ?», s'est interrogé de son côté sur Franceinfo le président délégué du Medef, Patrick Martin, dont l'organisation réserve sa position et attend l'issue des discussions avec le gouvernement.

Benoît Serre, vice-président de l'Association nationale des DRH, a pour sa part qualifié la mesure sur Sud Radio d'«une usine à gaz». «Qu'est-ce qu'on fait du salarié qui n'a pas de pass sanitaire ?», s'est-il interrogé. «Suspendre le contrat c'est une option grave quand même, parce que ça veut dire que les gens restent salariés mais perdent leurs salaires. [...] Si on pouvait éviter ça, on a déjà du mal à recruter.»

Le secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez, a fustigé pour sa part une mesure «absurde et totalement inefficace». «Nous préférons – et c'est ce que nous allons dire à la ministre ce matin – renforcer les gestes barrières, inciter plus à la vaccination, plutôt que l'instauration de ce pass vaccinal», a lancé le numéro un de la CGT cité par Franceinfo. Ce dernier a également mentionné les complications liées au secret médical et donc à la personne qui pourra, au sein d'une entreprise, contrôler le pass sanitaire.

«Mieux vaut convaincre et inciter que contraindre», a déclaré à l'AFP Michel Beaugas de Force ouvrière (FO), tandis que Cyril Chabanier (CFTC) s'est dit «assez réservé».

L'exécutif ne cache pas sa volonté de mettre la pression sur les non vaccinés face à la cinquième vague du Covid-19 et à l'arrivée du variant Omicron en France. Le gouvernement espère une adoption du pass vaccinal, qui doit remplacer le pass sanitaire, d'ici fin janvier. Après la ministre du Travail, ce sera au tour du Premier ministre Jean Castex de recevoir le 21 décembre les groupes parlementaires pour discuter des futurs champs d'application du pass sanitaire.