C'est un homme en colère qui a pris la parole le 28 octobre, dans une séquence passée sous les radars des médias traditionnels. Lors d'une conférence de presse organisée à Bruxelles, le député du Parlement européen Cristian Terhes a fustigé le manque de transparence dans la politique vaccinale de l'Union européenne (UE). Il a notamment dénoncé l'opacité des contrats d'achat de vaccins signés entre l'UE et les sociétés pharmaceutiques, et ce malgré un discours de façade promettant la «transparence».
Durant la conférence, l'eurodéputé roumain, qui est membre du Groupe des Conservateurs et Réformistes européens, a cité un article du journal Euractiv révélant que la copie du contrat signé entre la société allemande CureVac et l'Union européenne qui a été mise à disposition des députés européens contient de nombreux passages expurgés. Afin d'appuyer sa démonstration, l'eurodéputé roumain a exhibé plusieurs pages du contrat en question, chacune fortement caviardées. «Les gars, je vous pose la question : c'est ça la transparence ? Vous voyez quelque chose ? Parce que nous non !», a-t-il tempêté.
L'eurodéputé roumain a fustigé le fait que Bruxelles veuille «imposer un produit médical aux citoyens européens sans que ces derniers ne sachent ce que contiennent exactement les contrats d'achat».
Quand le gouvernement sait tout sur vous, c'est la tyrannie. Quand vous savez tout sur le gouvernement, c'est la démocratie
Cristian Terhes s'exprimait dans le cadre d'une conférence de presse organisée par quatre eurodéputés et visant à dénoncer le manque de transparence quant aux informations disponibles sur la politique vaccinale de l'UE, mais aussi l'instauration d'un pass sanitaire pour pouvoir siéger au Parlement européen. «Quand le gouvernement sait tout sur vous, c'est la tyrannie. Quand vous savez tout sur le gouvernement, c'est la démocratie», a-t-il lancé.
Un document lourdement caviardé
Pour rappel, les eurodéputés réclament depuis septembre 2020 d'avoir accès aux contrats passés au nom des 27 Etats membres, entre la Commission et l’industrie pharmaceutique. L’Union a beau avoir déboursé près de trois milliards d’euros pour l'achat de vaccins, rien d'officiel n’a encore filtré à ce jour sur la répartition de ces sommes entre les laboratoires, ni sur les prix fixés pour chaque dose de vaccin.
Comme révélé par France Info, le 12 janvier 2021, la direction générale de la santé de la Commission européenne avait autorisé un petit groupe d'eurodéputés à consulter le contrat signé entre la société Curevac et l'UE. La société allemande avait décidé de jouer la carte de «la transparence» en mettant son contrat à disposition des députés européens qui le souhaitent. Un effort de transparence qui reste en soi très limité, car les membres du parlement européens ne furent autorisés à consulter le document que pendant 45 minutes, et ce, avec interdiction stricte de prendre des photographies.
Pire encore, de nombreux passages du contrat avaient été caviardés pour l'occasion. Ainsi, selon Euractiv, «4,22 % des annexes portant sur les clauses de responsabilité et 15,38 % de celles traitant de l'indemnisation ont été noircies».
C'est donc cette version expurgée du contrat Curevac qu'a pu se procurer le site Euractiv et qu'a mentionné Cristian Tehres pendant sa conférence de presse.
Les parlementaires plaident pour plus de transparence
Dans une résolution adoptée le 21 octobre dernier (458 voix pour, 149 contre et 86 abstentions), le Parlement européen a appelé à une législation afin de rendre les procédures de recherche, d’achat et de distribution des vaccins contre le Covid-19 plus transparentes. «Cela permettrait aux députés de contrôler de façon efficace les politiques vaccinales de l’UE. En même temps, la Commission devrait discuter de façon plus ouverte de ces politiques avec les citoyens», précise le communiqué publié sur le site du Parlement.
Les parlementaires ont également appelé la Commission à «publier les accords d’achat passés avec les fournisseurs de vaccins et inclure les détails sur les investissements publics et le coût des vaccins, et rendre publique toute violation de contrat». Les députés européens sont d'avis que «davantage d'informations pourraient aider à lutter contre l'hésitation et la désinformation concernant les vaccins, et que les entreprises pharmaceutiques devraient également publier des données et des rapports détaillés sur les essais cliniques».
Mais leur avis sera-t-il entendu par la Commission ?