France

Olivier Véran reconnaît que de nombreux lits sont fermés dans les hôpitaux «faute de soignants»

Dans une interview accordée à Libération, le ministre de la Santé a commenté la fermeture d'un certain nombre d’unités dans les CHU et CHR en raison d'un déficit croissant de personnel soignant et, selon lui, «faute surtout de pouvoir en recruter».

Dans un entretien publié le 27 octobre dans Libération, le ministre de la Santé a commenté le déficit de personnel médical qui touche les hôpitaux publics français. Une situation due selon lui à un problème de recrutement et à une fatigue des soignants après 20 mois de crise sanitaire, mais aussi à des erreurs commises par le passé. L'ex-médecin neurologue a assuré en avoir fini avec «le dogme de la fermeture de lits» mais n'a cependant pas fait allusion aux suspensions de personnels médicaux ne s'étant pas soumis à l'obligation vaccinale.

On constate une hausse de près d’un tiers des postes vacants chez les paramédicaux par rapport à l’automne 2019

Interrogé sur une enquête menée par le président du Conseil scientifique Jean-François Delfraissy et relayée par Libération indiquant qu'environ 20% des lits des CHU et CHR de France seraient actuellement fermés faute de personnel, Olivier Véran a répondu en ces termes : «Oui, il y a un certain nombre d’unités dans des hôpitaux qui sont obligées de fermer temporairement, ou de réduire la voilure, faute de soignants, faute surtout de pouvoir en recruter [...] On constate une hausse de près d’un tiers des postes vacants chez les paramédicaux par rapport à l’automne 2019 [...] Les démissions augmentent plus significativement entre 2020 et 2021 qu’entre 2019 et 2020 [...] Certains soignants quittent l’hôpital parce qu’ils sont fatigués après vingt mois de crise sanitaire. Ces départs peuvent mettre en difficulté des équipes, des services parce que les recrutements sont aussi difficiles. C’est une réalité, et nous la prenons à bras-le-corps». Le ministre de la Santé a également évoqué le fait que, chez les étudiants infirmiers en formation entre 2018 et 2021, un peu plus d’un millier ont démissionné avant la fin de leurs études. «Une enquête sera lancée sur la question, je veux qu’on en comprenne les raisons», a-t-il précisé.

Je n’ai pas de médecins cachés dans le placard, ni des infirmières qui attendent dans une salle qu’on appuie sur un bouton pour les déployer dans les hôpitaux

Interrogé ensuite sur le «Ségur de la santé» entériné par le Parlement le 14 avril dernier, Olivier Véran a mis en avant les 10 milliards d’euros destinés à la hausse des salaires des soignants, ainsi que l'action du gouvernement «sur les perspectives de carrière ou la gouvernance», tout en reconnaissant avoir «bien conscience que cela ne suffit pas», car la problématique la plus importante réside dans «les conditions de travail dégradées à cause des sous-effectifs». «Mais je n’ai pas de médecins cachés dans le placard, ni des infirmières qui attendent dans une salle qu’on appuie sur un bouton pour les déployer dans les hôpitaux», déplore le ministre, avant de rejeter la faute sur ses prédécesseurs : «Je ne vais pas mentir aux gens. Il y a des décisions qui n’ont pas été prises il y a vingt ans, on les paye aujourd’hui. On ne réécrit pas l’histoire en un claquement de doigts, mais on peut inverser la vapeur maintenant». 

Nous en avons fini avec le dogme de la fermeture de lits

«Il faut le dire, beaucoup de nos soignants sont épuisés par la charge mentale et le rythme de travail de la crise», a insisté Olivier Véran, tout en assurant que le gouvernement en avait «fini avec le dogme de la fermeture de lits».

Le 11 octobre, une enquête de l'Ordre national des infirmiers, réalisée auprès de 59 368 soignants, alertait sur les détériorations des conditions de travail dans la profession. Une large majorité des infirmiers ayant répondu à ce sondage y décrit «une organisation fragilisée, parfois même en risque de rupture, et un état de fatigue et de découragement avancés».

Autre conséquence de l'épidémie de Covid-19 affectant les soignants : l'obligation vaccinale contre le Covid-19 qui est entrée en vigueur le 15 septembre pour 2,7 millions de professionnels du secteur de la santé. Depuis, des milliers de suspensions ont été signifiées à des personnels de santé non vaccinés contre le Covid-19.

A l'issue du Conseil des ministres le 27 octobre, le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a annoncé l'ouverture d'une enquête sur le sujet auprès des établissements de santé «pour objectiver la situation et son exploitation est en cours». «Les chiffres seront communiqués prochainement», a-t-il ajouté. Toutefois selon Gabriel Attal, le manque de personnel incomberait aux actions des précédents gouvernements : «On ne rattrape pas trente ans en quatre ans.»