La région PACA, dirigée par Renaud Muselier (Les Républicains), a proposé le 7 septembre à ses élus de voter le 29 octobre en faveur de l'entreprise Transdev – dont plus d'un tiers du capital est détenu depuis 2019 par le groupe allemand Rethmann, contre 66% appartenant toujours à la Caisse des dépôts et consignations – pour exploiter la liaison TER Marseille-Toulon-Nice.
Un contrat estimé à 870 millions d'euros
L'exploitation de la ligne en question par le nouvel opérateur devrait débuter en juillet 2025, «le temps d'acheter des trains et de construire des ateliers», explique l'AFP.
Le contrat de concession de 10 ans est estimé à 870 millions d'euros. Dans son offre, Transdev prévoit un doublement du trafic dès 2025, avec 14 allers-retours quotidiens contre sept actuellement, pour un prix censé rester «équivalent». «A voir si les promesses seront tenues...», nuance le magazine Marianne. En tout état de cause, l'objectif de densification du trafic était lié au marché en jeu, qu'importe l'acteur qui l'a remporté, ainsi que l'a relevé le journaliste Guillaume Champeau, reprenant un fil Twitter explicatif à ce sujet. «C'est une nuance importante», a-t-il commenté.
Dans les faits, la libéralisation des transports en France comporte son lot d'engagements non-tenus, à l'image de la «loi Macron» de 2015, censée générer dans le secteur des voyages en autocar quelque 22 000 emplois, contre 2 943 finalement effectifs en 2020. «Résultat : un duopole, des faillites, des dessertes réduites aux grandes villes… mais tout de même 10 millions de passagers», résumait à ce sujet L'Obs à l'été 2020.
Une libéralisation made in UE
Si la victoire de Transdev est confirmée fin octobre, il s'agirait de la première ligne pour le transport de voyageurs à échapper à la Société nationale des chemins de fer (SNCF) dans le cadre de la mise en concurrence du rail en France, conformément à la politique européenne des transports ferroviaires, qui se décline elle-même en quatre «paquets ferroviaires» mis en place par la Commission européenne.
Ces derniers définissent les étapes chronologiques de la libéralisation du rail imposée aux pays membres de l'UE. «Pour les contrats de service public, les autorités organisatrices p[euvent] lancer des appels d’offres dès décembre 2019. A partir de 2023, l’attribution concurrentielle devient la règle», peut-on par exemple lire sur le site gouvernemental de la régulation des transports, dans un article consacré à la politique européenne des transports ferroviaires.
La direction de la SNCF souhaite le meilleur à Transdev... Les syndicats inquiets
«Ce choix marque [...] la concrétisation de l'ouverture à la concurrence à laquelle nous nous préparons de longue date, où nos autorités organisatrices ont la liberté de choisir d'autres opérateurs que nous», a déclaré l'actuel PDG de SNCF Voyageurs, Christophe Fanichet, cité le 7 septembre par l'AFP.
L'opérateur historique français a en outre félicité le groupe Transdev : «SNCF Voyageurs souhaite le meilleur succès à Transdev, dans l'intérêt des voyageurs et du développement du transport ferroviaire dans la région», peut-on lire dans un communiqué de la SNCF.
La tonalité est loin d'être la même du côté des syndicats. «Nous ne sommes pas étonnés car cela démontre la volonté de la Région de donner à la concurrence les marchés les plus profitables [...] Nous sommes inquiets car ce ne sera pas sans coût pour les cheminots», a de son côté réagi Jean-Marie Valencia, responsable communication pour CGT Cheminots PACA, cité par l'AFP.
«Nous sommes attristés de cette décision car cela va entraîner le transfert de 166 agents [de la SNCF vers Transdev]», a souligné de son côté Didier Mathis, secrétaire général de l'Unsa ferroviaire, deuxième syndicat à la SNCF.
Quatre autres régions de France ont également annoncé leur volonté d'expérimenter l'ouverture à la concurrence de leur TER : le Grand-Est, les Hauts-de-France, l'Ile-de-France et les Pays-de-la-Loire.
L'Angleterre, une des pionnières de la privatisation des lignes ferroviaires dans les années 1990, a annoncé en mai une réforme censée mettre fin aux nombreux dysfonctionnements du secteur, notamment en terme de ponctualité.