L'Assemblée nationale a lancé ce 21 juillet l'examen du très contesté projet de loi qui doit étendre le pass sanitaire et rendre la vaccination obligatoire aux soignants. L'hostilité au projet de loi, qui s'est exprimée dans la rue le 17 juillet, n'a pas entamé la volonté du gouvernement de légiférer sur cette question malgré les près de 1 100 amendements déposés. De nouvelles restrictions sanitaires défendues bec et ongles par l'exécutif face à l'augmentation des contaminations au Covid-19 en France, dues notamment au variant delta.
Ainsi sur TF1, le Premier ministre, alarmiste, a déclaré afin d'appuyer son projet : «Dans la quatrième vague, on y est». Dans la foulée, Jean Castex a lancé «un défi collectif» à la population pour atteindre «huit millions de vaccins» administrés dans les deux prochaines semaines.
Après un examen en commission parlementaire la veille jusqu'à 5h ce matin, la séance parlementaire très mouvementée a démarré par le rejet par la majorité d'une série d'amendements de l'opposition visant à supprimer les éléments clés du projet législatif.
Les moutons ne sont pas ceux que l'on croit
En ouverture de cette séance parlementaire, le ministre de la Santé Olivier Véran a défendu avec ferveur son texte et s'est attaqué à ses opposants avec ironie : «Les moutons ne sont pas ceux que l'on croit», a déclaré le ministre pour rendre hommage au «pays qui tient bon», à la majorité de Français qui «ne vocifèrent pas».
Au cours de débats marqués par une tension palpable, l'opposition a pu exprimer ses critiques contre l'exécutif. Ainsi Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national, a fait entendre sa voix sur le sujet en dénonçant au-delà de la simple question sanitaire ce qu'elle considère comme une fracture au sein de la société : «La rupture qui existe entre le peuple et ses élites est le fait de l'absence de respect.»
Pour le président de Debout la France, Nicolas Dupont-Aignan, avec ce projet, le gouvernement va «priver de liberté plus de 20 millions de Français». Il a évoqué à propos du pass sanitaire «une usine à gaz incontrôlable» et un projet «inapplicable».
Le député Les Républicains Fabien Di Filippo a exprimé son incompréhension face à ce qui lui semble constituer des incohérences du texte : «Comment expliquer qu'il [le pass sanitaire] ne sera pas imposé dans des grands centres commerciaux mais dans des petits événements en plein air ?»
La gauche, pas en reste, a elle aussi tonné contre le projet du gouvernement. Ainsi, Alexis Corbière, député de La France insoumise et proche de Jean-Luc Mélenchon, a dénoncé ce qu'il considère comme un manque de considération envers la représentation nationale de la part du président de la République : «C'est la vérité, ce n'est pas le Parlement qui a pris la décision, c'est le président de la République !»
C’est l’Absurdie généralisée
La députée insoumise Mathilde Panot a décrit un texte «absurde et incohérent», ajoutant de pas comprendre que l'obligation vaccinale soit imposée au personnel soignant mais «pas pour les policiers» avant de conclure : «C’est l’Absurdie généralisée !»
De son côté, la députée socialiste Valérie Rabault a évoqué «des solutions bancales qui crispent la société» et critiqué la «version proposée» par le gouvernement.
«Nous n’avons aucune visibilité sur la rentrée, nous en avons marre de vos approximations. Anticipez, rendez obligatoire la vaccination», a déclaré Lamia El Aaraje du Parti socialiste, dont les parlementaires se sont prononcés contre le pass mais pour rendre obligatoire le vaccin contre le Covid-19 à l'ensemble de la société.
Je crains que nous nous habituions à ce qui nous paraissait il y a encore quelques semaines, à tous, inimaginable
Isolé au sein de son groupe parlementaire, Pacôme Rupin, député de la majorité présidentielle, a exprimé ses inquiétudes et ses doutes envers le projet de loi : «Je crains que nous nous habituions à ce qui nous paraissait il y a encore quelques semaines, à tous, inimaginable.»
Aurélien Taché, ancien membre de la majorité présidentielle, qui a créé le parti Les Nouveaux Démocrates, a aussi exprimé son opposition au projet : «Cette loi, c’est l’instauration de la fameuse "société de vigilance" chère à Emmanuel Macron et qui n’est en réalité rien d’autre qu’une société de surveillance !»
Ancienne de la majorité également, la députée Martine Wonner, exclue de son groupe à l'Assemblée nationale après des propos incitant à «envahir» les permanences des parlementaires et qui s'apprête à lancer son propre «mouvement», a électrisé l'Hémicycle en déclarant que le pass sanitaire allait «stigmatiser la population» et créer une «ségrégation entre les individus».
Une mobilisation avait encore lieu ce 21 juillet à Paris, contre le projet de loi du gouvernement débattu à l'Assemblée nationale.