Le ministre de la Santé Olivier Véran a promis le 7 juin que des couples de femmes pourront «s'inscrire dans des parcours PMA dès la rentrée», alors que les débats ont repris entre les députés qui examinent pour la troisième fois le projet de loi de bioéthique ouvrant également la procréation médicalement assistée aux femmes seules.
Le Parlement doit adopter définitivement le texte en juillet et «les textes d'application de la loi doivent être préparés dès à présent» afin «que des premiers enfants puissent être conçus avant la fin de l'année 2021», a garanti le ministre. Outre l'ouverture de la PMA, le projet gouvernemental prévoit une réforme de la filiation et de l'accès aux origines, et aborde plusieurs sujets complexes comme l'autoconservation des ovocytes ou la recherche sur les cellules souches embryonnaires.
Alors que des associations LGBT (l'Inter-LGBT, SOS Homophobie, Gaylib, l'Association des parents gays et lesbiens) alertent «sur les trop nombreux manquements du texte», comme l'exclusion des hommes trans de l'accès à la PMA, Olivier Véran a convenu que «ce texte ne satisfera pas tout le monde, mais il sera un texte équilibré, ambitieux sans être aventurier, et responsable sans être tiède».
La Manif pour tous présente devant l'Assemblée nationale
La droite parlementaire, principale opposante sur le sujet, a déposé près des deux tiers des 1 550 amendements qui devaient être étudiés d'ici le 11 juin. Il en restait plus de 1 300 encore à discuter le 7 juin en fin de soirée, à la suspension des débats. Plusieurs amendements émanant de la droite visant à supprimer l'article premier du projet – relatif à la PMA – ont été balayés par la majorité et la gauche.
«Vous allez créer des orphelins de père», s'est indigné le député LR Patrick Hetzel, sa collègue Annie Genevard estimant qu'«un père c'est un père» et que les parlementaires favorables au projet se comportent en «apprentis-sorciers». «Avec l'effacement de ce père, c'est la suppression d'une partie de la femme que vous organisez et c'est une partie de l'enfant que vous volez», a lancé à la tribune la députée Emmanuelle Ménard.
Le 7 juin, jour d'ouverture des débats, plus de 200 personnes se sont rassemblées devant le Palais Bourbon à l’appel de La Manif pour tous pour protester contre ce texte. «PMA sans père, savez-vous ce qu’en disent les psychiatres ?», ont lancé des manifestants cités par l'AFP, tandis que des drapeaux étaient distribués, avec l'inscription «Liberté, égalité, paternité».
«On va priver définitivement, pour toujours, des enfants d'un père. C'est une injustice terrible et on crée une inégalité nouvelle», a expliqué le 7 juin dans la matinale de RT France Ludivine de la Rochère, présidente de La Manif pour tous, qui dénonce un texte «déconnecté du réel, dans l'idéologie la plus pure».
C'est l'amour de l'enfant qui est premier dans la définition de la parentalité
A l'inverse, à gauche, la communiste Elsa Faucillon s'est réjouie d'une «avancée juste et indispensable» dont «nous devons être collectivement fiers». Le socialiste Gérard Leseul a dénoncé pour sa part «le combat d'arrière-garde, réactionnaire» de la droite.
A la tribune, le député LFI Jean-Luc Mélenchon a vanté «la liberté nouvelle permise par la PMA». «Des présences parentales sans papas, il y en a déjà des milliers et des milliers dans notre pays. [...] Le jugement de Salomon nous montre comment c'est l'amour de l'enfant qui est premier dans la définition de la parentalité. On trouve le même exemple dans la culture chinoise», a-t-il poursuivi. Le leader des Insoumis a néanmoins précisé au cours de son allocution avoir «observé jusque-là partout que la GPA transforme le corps des femmes en outil de production, et c'est pourquoi nous y sommes opposés».
Sur RT France, l'avocate Caroline Mecary a également qualifié de «fantasmes» les doutes de la droite sur la PMA. «Aujourd'hui, s'il y a un "danger", c'est pour les enfants qui sont conçus avec la PMA pour des couples hétérosexuels et qui ne connaissent pas leur histoire. Je rappelle qu'en Europe il y a déjà 14 pays qui ont ouvert la PMA à tous les couples et 26 pays le permettent à des femmes célibataires», a-t-elle souligné.
Le projet de loi, sur lequel les députés ont la liberté de vote, a entamé son parcours parlementaire à l'automne 2019. Il y a un an, le Sénat dominé par la droite avait voté le projet de loi avec sa mesure d'ouverture de la PMA, excluant toutefois la prise en charge par la Sécurité sociale. Mais en deuxième lecture, les sénateurs ont adopté dans la confusion le texte amputé de cette mesure emblématique. Députés et sénateurs n'ont pas trouvé de compromis, d'où cette dernière navette, avec ensuite une nouvelle lecture au Sénat le 24 juin et le dernier mot pour l'Assemblée.