Adepte du «live streaming» consistant à commander et acheter sur le net une séance en direct de viol d'enfants, un homme d'une cinquantaine d'années a été condamné mi-mai à Paris à six ans de prison ferme pour «complicité d'agression sexuelle sur mineurs» de moins de 15 ans.
C'est la deuxième fois qu'une condamnation pour ce type de faits est prononcée en France, a commenté le 4 juin auprès de l'AFP Véronique Béchu, chef du groupe central des mineurs victimes (GCMV), qui dépend de la direction centrale de la police judiciaire. Le premier cas date de janvier 2020. Un pilote de ligne français, résidant à Singapour, avait été condamné à cinq ans de prison ferme.
«C'est une première marche. Notre objectif est de parvenir à traduire les auteurs de ces faits devant une cour d'assises», a ajouté Véronique Béchu, qui a observé une "explosion" de cette pratique depuis le début de la pandémie. Actuellement, le groupe de Véronique Béchu travaille sur une «vingtaine de procédures en cours» et soupçonne «300 français résidant en France» et qui s'adonneraient à cette pratique.
Le «live streaming» de viols de mineurs, connu depuis une dizaine d'années, est apparu dans l'île de Cebu, aux Philippines, premier pays producteur de ces séances. Depuis, a expliqué Véronique Béchu, le phénomène a essaimé, gagnant la Roumanie, l'Afrique et l'Amérique du Sud, essentiellement des pays pauvres.
Une séance de viol de mineurs de 40 à 45 minutes coûte 15 euros, une séance de torture 50 euros. «Avec 50 euros aux Philippines», a poursuivi la responsable du GCMV, «une famille peut vivre un mois».
«Pas de profil type» mais «souvent» des personnes travaillant «en lien avec les enfants», selon Véronique Béchu
Pour le pédocriminel, il suffit de commander et d'acheter en ligne la séance, qu'il suivra en direct sur le net. Il détermine le scénario et peut demander en direct ce qu'il désire. Il est très difficile pour les enquêteurs de confondre les personnes qui visionnent ces séances sur le darknet.
«Depuis le premier dossier [du pilote de ligne], un gros travail de coopération judiciaire a été effectué avec l'étranger, notamment les Philippines», selon Véronique Béchu. La saisie d'images et de vidéos pédopornographiques a permis de constituer des bases de données nationales et internationales. Les services d'Europol ont pu ainsi identifier «150 victimes».
Le cas du Français condamné en mai est un peu particulier, car il était un «collectionneur» compulsif d'images. Il a été d'ailleurs interpellé à deux reprises, en 2001 et 2016, pour détention et diffusion d'images pédopornographiques (8 millions d'images et 4 millions de vidéos). C'est en examinant ses vidéos que les enquêteurs ont identifié un «live streaming» de viol à distance, qui a conduit à son interpellation en 2019.
Véronique Béchu explique qu'il n'y a «pas de profil type» de ces adeptes. «Cela va de 20 à 85 ans, mais ils sont de plus en plus jeunes. A 99%, ce sont des hommes et quand il y a des femmes, ce sont des couples. Il y a toutes sortes de professions : libérale, fonctionnaire... Souvent, des professions en lien avec des enfants.»
Pour réprimer le délit de «sextorsion», la loi du 21 avril dernier punit de sept ans de prison et 100 000 euros d'amende le fait pour un adulte d’inciter un mineur à se livrer à des pratiques sexuelles sur internet.