Le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti a décidé de se lancer sur la liste La République en Marche (LREM) aux régionales dans les Hauts-de-France. «Je serai au premier rang dans le Pas-de-Calais sur la liste de Laurent Pietraszewski [secrétaire d'Etat chargé des retraites et tête de liste]», a déclaré le garde des Sceaux le 7 mai à La Voix du Nord.
«Parce que je ne veux pas que cette terre file entre les mains du RN», a-t-il justifié, rappelant qu'il était né d'une mère italienne à Maubeuge, dans le Nord et que ses enfants étaient nés à Tourcoing. «Madame le Pen refuse de débattre avec moi. Elle ne veut pas venir à moi, alors je viens à elle», a-t-il argumenté, ajoutant qu'à la différence de Xavier Bertrand – actuel président de la région et candidat déclaré à la présidentielle 2022 – il ne voulait pas «chasser sur les terres du Rassemblement national». «Je veux chasser le Rassemblement national de cette terre», a-t-il lancé.
Elue conseillère régionale en 2015, Marine Le Pen n'affrontera pas directement Eric Dupond-Moretti, puisqu'elle sera cette fois candidate aux départementales dans le Pas-de-Calais, sur le canton d'Hénin-Beaumont, fief RN. La présidente du Rassemblement national n'a toutefois pas manqué d'ironiser sur l'«obsession» d'Eric Dupond-Moretti à son égard. «L’obsession que Monsieur Dupond-Moretti a à mon égard commence à devenir relativement étrange, il paraît qu'il reste quelques bracelets anti-rapprochement en rab, je suis preneuse», a-t-elle déclaré en riant à l'issue de la cérémonie du 8-Mai à laquelle elle a assisté à Hénin-Beaumont. «Je n’ai pas à débattre avec Monsieur Dupond-Moretti, moi je débats avec Emmanuel Macron, éventuellement», a-t-elle conclu.
Une provocation politicienne, obsessionnelle vis-à-vis du RN
La région Hauts-de-France est avec PACA la seule où le RN est l'unique opposant dans l'hémicycle, après le désistement en 2015 de la liste PS pour faire barrage à Marine Le Pen, arrivée en tête au premier tour avec 40,6% des voix. Quatre des sept députés RN sont issus de ce territoire, où il dirige aussi trois communes.
Tête de liste RN, Sébastien Chenu a réagi à la candidature du ministre de la Justice, y voyant «une provocation politicienne, obsessionnelle vis-à-vis du RN», ironisant sur «la grosse artillerie» mise en place par la majorité présidentielle.
Outre la volonté de porter un coup au RN, l'offensive Dupond-Moretti vise également à fragiliser Xavier Bertrand, candidat déclaré de droite dans la course à l'Elysée depuis le 13 avril. «Rien ne m'étonnerait de la part d'un président de la République aux abois», avait déjà anticipé Xavier Bertrand dans un entretien au Figaro le 6 mai, interrogé sur l'hypothèse Dupond-Moretti. «[Emmanuel Macron est] un calculateur froid, un destructeur», avait-il aussi fustigé.
«Je considère que les Hauts-de-France ne sont pas un prétoire, je comprends que Laurent Pietraszewski et La République en Marche ont besoin d’un avocat pour défendre leur bilan, mais le verdict ce sont les gens, c’est le scrutin», a pour sa part réagi Karima Delli, à la tête d'une liste d'union verts/gauche.