France

Un entrepreneur bientôt jugé pour avoir proposé de la chloroquine à ses salariés

René Pich, fondateur du groupe de chimie SNF, comparaîtra devant le tribunal correctionnel de Saint-Etienne le 3 juin pour avoir invité, en mars 2020, ses salariés touchés par le Covid-19 à demander à la direction la délivrance de chloroquine.

René Pich, fondateur du groupe de chimie SNF, qui, voici un an, proposait à ses salariés atteints du Covid-19 des comprimés de chloroquine, comparaîtra devant le tribunal correctionnel de Saint-Etienne le 3 juin prochain, selon des sources concordantes citées par l'AFP. Il devra répondre d’«exercice illégal de la profession de pharmacien, exercice illégal de la profession de médecin, acquisition illicite, importation en contrebande et détention de substances vénéneuses».

Le principe de précaution m’oblige à trouver dans ces périodes de polémiques des moyens de survivre

Une enquête préliminaire avait été ouverte début avril 2020 après un signalement de l'inspection du travail de la Loire, déclenché par une note de René Pich informant l'encadrement de SNF de l’acquisition de comprimés de phosphate de chloroquine.

Dans cette communication, datée du 18 mars, le dirigeant invitait les salariés touchés par le Covid-19 à demander à la direction la délivrance de ce produit, tout en leur indiquant la posologie à suivre jusqu’à la disparition des symptômes au bout de quatre à sept jours, dix au maximum. L'enquête a établi que l’industriel avait constitué un stock de 1200 comprimés, achetés en Inde. Des «substances soumises à prescription médicale», rappelle l'accusation, et destinées, sur la «propre prescription» de M. Pich, à ses salariés.

«J’ai 79 ans et du diabète. Ma chance de mourir du Covid-19 est de plus de 20%. Nous avons dans la société une dizaine [peut-être plus] de salariés avec des pathologies graves. Le principe de précaution m’oblige à trouver dans ces périodes de polémiques des moyens de survivre», s'était justifié René Pich, en assurant qu'une partie de ces plaquettes avait été «donnée aux hôpitaux», avec l'indication de leur provenance.

Le groupe de 6500 salariés, dont 400 en France, avait de son côté affirmé que SNF «n’avait aucun lien de quelque nature que ce soit avec ce dossier». «La plainte vise individuellement son fondateur René Pich et non la société elle-même», avait précisé l'entreprise, qui s'était défendue de tout «achat» de chloroquine et avait assuré n'en avoir «jamais reçu, ni de René Pich, ni de quiconque».

Les organisations syndicales se constituent partie civile

En apprenant son renvoi en correctionnel, René Pich a contesté cette semaine, via une note sur le site intranet de sa société, les délits qui lui sont reprochés, évoquant «une affaire totalement personnelle», qui, selon lui, ne justifie pas que les organisations syndicales se constituent parties civiles. En outre, il y a revendiqué «la responsabilité d’essayer de proposer une alternative à l’inaction du système médical français», qu'il accuse de refuser «des médicaments qui ont fait leur preuve».

Sofia Soula-Michal, avocate du syndicat CFDT-chimie à l'origine d'une plainte, a qualifié la décision du parquet de «rassurante pour les salariés qui ne se sentent plus seuls face à la toute-puissance d’une direction qui s’affranchit très régulièrement du droit du travail, avec pour seul objectif la rentabilité quoi qu’il en coûte».