France

«La laïcité a perdu une bataille» : une audition au Sénat établit un constat sévère sur l'école

Auteur d'un rapport sur l'entrisme islamiste à l'école qu'il estime avoir été enterré dans les années 2000, Jean-Pierre Obin a été auditionné le 10 mars par les sénateurs dans le cadre de l'étude du projet de loi contre «le séparatisme».

Auteur du livre Comment on a laissé l’islamisme pénétrer l’école, paru en 2020, et ancien inspecteur général de l’Education nationale, Jean-Pierre Obin a été chargé par le ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer d’une mission destinée à harmoniser et améliorer la formation à la laïcité des enseignants. Il était auditionné le 10 mars par la commission culture du Sénat, qui examine actuellement le projet de loi contre «le séparatisme» présenté par le gouvernement.

Le rapport Obin dresse un constat sévère sur la situation dans les écoles et il dénonce des «atteintes croissantes à la laïcité», menacée par l'islamisme  : «Chaque jour, de nouveaux travaux montrent que la situation s’aggrave dans l’école. La laïcité a perdu une bataille vis-à-vis de la jeunesse musulmane qui est de plus en plus et très largement pénétrée par l’idéologie islamiste», a-t-il déclaré devant les sénateurs. 

Au sujet du voile à l'école, l'auditionné a estimé : «C’est le premier signe, qu’on ne sait pas interpréter, de l’arrivée dans les quartiers d’un certain nombre de prédicateurs qui endoctrinent des jeunes, et notamment des jeunes filles.»

Jean-Pierre Obin a également étrillé le «nouvel antisémitisme» qu'il avait observé dès 1996 : «Un principal m’explique alors que ses derniers élèves juifs ont été forcés de quitter le collège.» Et de dénoncer une «omerta des services académiques [qui] recasent ces élèves de la façon la plus discrète possible sans que jamais ce scandale ne soit mis sur la place publique.»

80 à 90 % des lycéens musulmans expriment une conception punitive de la laïcité

Le fameux rapport Obin rédigé au milieu des années 2000 a selon lui été «enterré par le ministre de l’Education nationale de l’époque, François Fillon.» Et depuis lors, toujours selon cette même source : «La situation n’a fait qu’empirer.» Et de souligner : «Un quart des musulmans de France adopte des valeurs contraires à celles de la République. Mais, ce qu’on n’a pas dit à l’époque, c’est que cette proportion s’élève à 50 % chez les 15-24 ans.»

Jean-Pierre Obin y voit une «pénétration de l'islamisme» qui induirait une «autocensure» chez 37% des enseignants interrogés en 2016, une proportion qui ne cesserait d'augmenter depuis l'assassinat islamiste de Conflans-Sainte-Honorine en octobre 2020, de «peur de possibles incidents».

Devant les sénateurs, il déplore également une influence de la pensée universitaire américaine dans la sphère française : «Le problème majeur [est] un certain nombre d’idéologies venues des Etats-Unis qui pervertissent totalement la recherche française et qui impose une doxa à l’ensemble des départements de sciences humaines.»

Jean-Pierre Obin rappelle également que selon un récent sondage Ifop pour la Licra, «80 à 90 % des lycéens musulmans [expriment] une conception punitive de la laïcité.» Et de préciser : «Ils estiment qu’elle est faite pour les contraindre, eux les musulmans, et qu’elle serait une marque, je n’aime pas trop ce terme, mais il est pratiqué, d’islamophobie.»

Plus inquiétant encore, selon l'ancien inspecteur général : «D’après les chiffres du ministère, 11 % des auteurs [d’atteintes à la laïcité] sont des personnels de l’éducation nationale. En général, ces incidents visent les élèves musulmans pour les rappeler à la religion. A la cantine par exemple, une dame de service dit à un élève : "Tu manges du porc toi ? Mais ta religion te l’interdit."»