Les joueurs du Paris Saint-Germain et du Basaksehir Istanbul ont quitté la pelouse du Parc des princes le 8 décembre alors que se jouait un match de Ligue des champions.
La rencontre a pris un tournant inattendu à la 14e minute de la partie. Des membres du staff turc – au premier rang desquels Pierre Achille Webo, membre camerounais de l'encadrement du Basaksehir – ont en effet crié leur colère, audible dans un stade à huis clos : «Il a dit "negro"», ont-ils clamé en pointant le quatrième arbitre Sebastian Coltescu.
Selon un sonore du match, traduit par un journaliste de l'AFP, Sebastian Coltescu aurait prononcé la phrase suivante : «(C'est) le Noir ici. Va voir et identifie le. Ce gars, le Noir ("negru" en roumain)».
Il venait alors de signaler à l'arbitre principal Ovidiu Hategan la réaction, trop véhémente à son goût de Pierre Achille Webo, après une décision arbitrale. La tension est montée d'un cran lorsque le directeur de jeu a expulsé le Camerounais du banc de touche.
L'UEFA lance une enquête sur l'incident
Les joueurs se sont alors dirigés vers le bord du terrain, appelés notamment par l'attaquant remplaçant de Basaksehir Demba Ba, l'international sénégalais, très remonté. Après des échanges qui ont duré une dizaine de minutes, les joueurs stambouliotes ont pris la direction des vestiaires, suivis par les Parisiens, sous les applaudissements de membres de l'encadrement des clubs.
Peu de temps après l'interruption, le président du club turc Göksel Gümüsdag a indiqué que ses joueurs ne reprendraient pas la partie tant que le quatrième arbitre serait présent.
Je ne peux que saluer la symbolique forte de leur geste et leur solidarité
Après plus de deux heures de discussions, d'informations contradictoires et d'attente, le club turc puis l'UEFA ont fait savoir que la rencontre allait reprendre le lendemain, là où elle s'était arrêtée.
L'UEFA a également annoncé qu'elle lançait une enquête. Après l'interruption, Kylian Mbappé s’est adressé à Pierre Achille Webo sur Twitter : «Dites non au racisme ! M. Webo nous sommes avec vous».
La ministre des sports Roxana Maracineanu a elle salué «la symbolique forte» des joueurs du Paris SG et de l'Istanbul Basaksehir. «Ce soir des sportifs, des athlètes ont pris une décision historique face à une attitude qu’ils ont jugée inacceptable», a-t-elle écrit sur Twitter. «Une expression de racisme ordinaire. Nous attendons les résultats de l’enquête mais je ne peux que saluer la symbolique forte de leur geste et leur solidarité», a ajouté la ministre française, née en Roumanie.
Réactions des autorités roumaines
«Je condamne fermement tout propos qui peut être interprété comme raciste, xénophobe ou discriminatoire», a déclaré le lendemain le ministre roumain des Sports, Ionut Stroe, à la chaîne DigiTv. «Je présente mes excuses au nom du sport roumain pour cet incident malheureux, qui ne nous représente pas», a-t-il ajouté.
La Fédération roumaine de football (FRF) a de son côté indiqué dans un communiqué se «distancier fermement de toute action ou déclaration à connotation raciste ou xénophobe».
«Nous attendons le rapport de l'UEFA pour savoir exactement ce qu'il s'est passé et agir en conséquence», a ajouté la FRF.
Les propos de l'arbitre ont également suscité les vives critiques du Conseil national antidiscrimination (CNCD) roumain, qui a souligné que «le rôle des arbitre est justement celui de sanctionner des gestes racistes».
«Ce sont des propos racistes, sans aucun doute [...], cet arbitre ignore complètement les valeurs et les règles de la FRF, de l'UEFA et de la FIFA», a déclaré le président du CNCD, Csaba Asztalos. «C'est une énorme tache sur la Roumanie et sur l'arbitrage roumain, un incident d'une gravité extrême», a-t-il martelé.
Jamais en France, ou en C1 cette saison, une rencontre n'a été interrompue aussi longuement pour ces raisons.