Le métier de journaliste de terrain deviendrait-il risqué en France ? Habitué à couvrir les manifestations, Rémy Buisine, reporter pour le média Brut, a eu toutes les peines du monde à pouvoir exercer son activité le 23 nombre 2020. Venu couvrir l'évacuation par les forces de l'ordre d'un campement de migrants place de la République à Paris, il a été pris à partie par un policier, à trois reprises, selon lui, pendant la soirée.
Sur des images filmées par des journalistes de RT France et Sputnik, on le voit notamment être molesté alors qu'il est à terre.
Quelques instants plus tard, alors que les forces de l'ordre l'ont laissé repartir, le journaliste commente : «J'en ai marre, putain. On veut juste bosser correctement. C'est la troisième fois qu'il nous frappe depuis tout à l'heure. Vous nous poussez où, dans les gaz lacrymogènes ? On veut juste travailler, merde !»
«Jamais deux sans trois», glisse un policier en guise de réponse, alors qu'un de ses collègues reproche au reporter de ne pas être identifié. «Et vous, vous êtes identifié ? Il est où le RIO [référentiel des identités et de l'organisation] ?», rétorque Rémy Buisine.
Le média Brut a fait savoir son intention de demander des «explications» au préfet de police ainsi qu'au ministère de l'Intérieur quant au traitement de son journaliste.
Deux enquêtes à Paris visent des policiers pour «violences»
De son côté, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a déclaré avoir demandé à l'IGPN de remettre ses conclusions sous 48h sur les violences intervenues dans la soirée du 23 novembre.
Le parquet de Paris a annoncé ce 24 novembre avoir ouvert deux enquêtes relatives à des faits de «violences» dont sont soupçonnés des policiers sur un migrant et donc sur le journaliste Rémy Buisine. L'Inspection générale de la police nationale (IGPN) a été chargée d'enquêter sur ces faits.
Des images de violences lors du démantèlement par les forces de l'ordre ont été relayées sur les réseaux sociaux. On y a notamment vu des migrants sortis de leur tente par la force et des coups de matraque infligés.
Cette évacuation controversée intervient alors que les députés s'apprêtent dans l'après-midi à voter le texte Sécurité globale dont une disposition prévoyant des sanctions en cas de diffusion d'images de policiers les mettant en danger est vivement critiquée par la presse et l'opposition de gauche, notamment, mais également au sein même de la majorité présidentielle.