France

«Discrimination» : les soignants intérimaires indignés de ne pas avoir reçu la prime Covid

La fameuse «prime Macron» promise aux soignants fin mars durant le pic de la crise sanitaire n'aurait pas bénéficié à ceux qui sont employés en intérim. Cités par Le Monde, patronat et syndicats dénoncent une discrimination.

Selon une information du Monde, les soignants employés en intérim auraient été exclus du dispositif de prime exceptionnelle accordée à ceux qui ont pris soin des malades du Covid-19 au plus fort de l'épidémie. 

Fait rare : dans une «lettre paritaire» signée à la fois par le patronat et les syndicats de la branche du travail temporaire, et envoyée le 29 juillet au ministère des Solidarités et de la Santé, ces partenaires sociaux demandent la réparation d’une «discrimination incompréhensible», vécue comme du «mépris» pour les intérimaires de la santé.

Annoncée en pleine crise sanitaire le 25 mars par Emmanuel Macron pour remercier «nos soignants qui se battent aujourd’hui pour sauver des vies», la prime pouvait atteindre les 1 500 euros.

Le doute quant à l'octroi de cette prime aux intérimaires a commencé au mois de juin, avec une note diffusée par l’agence régionale de santé (ARS) du Grand-Est indiquant que cette catégorie de main-d’œuvre «n’était pas concernée par le dispositif», rapporte Isabelle Eynaud-Chevalier, déléguée générale de Prism’emploi, une organisation qui regroupe plusieurs centaines d’entreprises de travail temporaire, citée par Le Monde. Celle-ci assure que les sollicitations d'explications auprès du ministère de la Santé sont restées lettre morte.

Il a fallu attendre que le troisième projet de loi de finances rectificatives pour 2020, définitivement adopté par le Parlement le 23 juillet, vienne traduire «en termes juridiques cette exclusion», déplore la déléguée générale de Prism’emploi. Une mesure qui contredit le principe fondamental d’«égalité de traitement, inscrit dans le code du travail», dénonce-t-elle. «C’est assez terrible, sur le plan symbolique, car les soignants, quel que soit leur statut, ont tous été actifs. Et le virus, lui, n’a fait aucune distinction» ajoute Isabelle Eynaud-Chevalier.

Le coût pour les finances publiques n’aurait rien d’exorbitant

Son organisation estime à «13 000 équivalents temps plein» le coût de l'octroi de cette prime aux intérimaires et «le nombre de ceux qui pourraient en bénéficier serait inférieur puisque le versement de la somme est soumis à certaines conditions», souligne Isabelle Eynaud-Chevalier. «Nous ne sommes pas face à une population gigantesque, et le coût pour les finances publiques n’aurait rien d’exorbitant», conclut-elle.

«Des sous-salariés»

Du côté des syndicats, c'est la même incompréhension qui règne. «C’est comme si on leur disait qu’ils sont des sous-salariés», déclare au Monde Laetitia Gomez, secrétaire générale de la CGT-Intérim. La Présidente de la CFTC-Intérim Agnès Marchat qui ne dit pas autre chose dénonce une disposition «discriminatoire» exprime l'espoir que «l’Etat va revenir dessus». Olivier Guivarch, le responsable de la fédération CFDT des services, toujours pour Le Monde, regrette pour sa part un arbitrage rendu «sans les partenaires sociaux» et sans qu’un effort de «pédagogie» ait été accompli.

Le Monde rapporte que le ministère des Solidarités et de la Santé fait pour sa part valoir que «la prime Covid a été mise en place pour que chaque établissement puisse valoriser l’engagement de ses soignants, médecins comme paramédicaux face à la crise». «Elle couvre donc l’ensemble des professionnels de l’établissement, mais ne s’étend ni aux intérimaires salariés ni aux prestataires», déclare une source du ministère sans fournir plus de précisions. Le choix du gouvernement demeure donc inexpliqué. «C’est une raison de gros sous », assure, sous le sceau de l’anonymat, un haut fonctionnaire qui a suivi le dossier, cité par le quotidien du soir. Selon cette même source, le ministère de la Santé «ne veut pas payer», notamment parce qu’il considère que «les intérimaires sont déjà bien rémunérés, surtout les médecins».