Fort de son succès aux municipales, le parti Europe Ecologie Les Verts (EELV) se tourne déjà avec ambition vers la prochaine échéance électorale : la présidentielle de 2022. C'est dans cette optique que l'eurodéputé Yannick Jadot a lancé un appel clair au rassemblement, à l'attention «des forces de gauche qui le souhaitent», voire au-delà.
Interrogé sur une éventuelle candidature à la présidentielle dans un entretien au Journal du dimanche, Yannick Jadot n'a en effet pas éludé : «Je m'y prépare. L'écologie a une responsabilité immense : celle d’accéder au pouvoir pour transformer la vie des citoyens.»
Pour y parvenir, l'eurodéputé entend donc répéter la stratégies des municipales, où les victoires d'EELV dans plusieurs grandes villes ont été possible grâce à de coalitions de gauche : «[Il faut] dès la rentrée lancer un vaste rassemblement autour de l’écologie, des forces de gauche qui le souhaitent et, au-delà, des citoyens qui se retrouvent dans cette nouvelle matrice politique.» Et de marteler qu'il fallait «encore élargir le rassemblement, de la génération climat aux entrepreneurs qui investissent massivement dans l’écologie».
Une idée à laquelle adhère le patron du PS Olivier Faure, qui s'est déjà dit «prêt» à se ranger derrière le candidat qui incarnera le bloc social-écologiste, et ce quelle que soit son origine politique. De concert avec son homologue le secrétaire national d'EELV Julien Bayou, il a par ailleurs un temps projeté d'organiser une université d'été commune, élargie à la gauche et la société civile. Si le projet a pour l'instant été remisé à l'automne, l'idée d'un rassemblement fait incontestablement son chemin dans les arcanes des deux partis.
Il faut dire que, marginalisé depuis l'émergence du mouvement porté par Emmanuel Macron, le PS a tout intérêt à se rallier à des écologistes qui ont le vent en poupe. Un constat que pourrait largement partager Benoît Hamon, en pleine traversée du désert depuis sa déroute lors de la présidentielle 2017, et menant désormais le mouvement Génération.s. Signe que l'idée ne devrait – dans l'absolu – pas lui déplaire, Benoît Hamon a apporté un soutien discret à des listes de coalition portées par les écologistes pour les municipales, à l'instar de celle d'Archipel citoyen à Toulouse ou du Printemps Marseillais dans la citée phocéenne.
Mélenchon : «[Jadot dit] que je peux rallier son projet. Fort bien. Lequel ?»
Mais pour réussir son pari et conquérir l'Elysée, EELV ne peut pas se priver du soutien de La France insoumise. Or cette tâche s'annonce autrement plus ardue. En perte de vitesse lors des dernières élections, LFI n'en demeure pas moins une des principales forces politiques à gauche et leur chef de file Jean-Luc Mélenchon n'entend pas s'effacer aussi facilement.
S'il reconnaît volontiers l'échec de son parti aux municipales, jugeant que le «pari» des insoumis de se fondre dans des listes citoyennes n'avait «pas fonctionné», il ne partage pas pour autant l'analyse de Yannick Jadot concernant le scrutin. Pointant «l'abstention écrasante», il a ainsi affiché son scepticisme sur les résultats, qui ont consacré à gauche la place prépondérante des écologistes et des coalitions de gauche. «Les élections démontreraient que l'union paye. Oui pour les municipales, et pour le peu qui a voté, mais il n'est pas vrai que la situation soit réglée», a-t-il ainsi lancé en clôture de l'Assemblée représentative de son parti, estimant que les 60% d'abstention signifiaient «un vote de classe».
Assurant qu'il n'avait pas encore arrêté de décision sur sa candidature en 2022, le chef de file de insoumis a tout de même pris le temps de répondre aux appels du pieds de Yannick Jadot sur un éventuel rassemblement : «La clé c'est la clarté, l'intransigeance sur les idées, et non de faire le plus petit commun dénominateur pour ne pas parler de ce qui gène.» «[Yannick Jadot dit] que je peux rallier son projet. Fort bien. Lequel ?», s’interroge également le député de Marseille.
Malgré tout, Jean-Luc Mélenchon n'a pas écarté la possibilité de discussions, sans toutefois se montrer très confiant sur leur issue. En cause, une différence idéologique majeure des deux partis sur la question européenne. «Nous avons un immense problème avec l'Europe», a-t-il soutenu, jugeant celle-ci dominée par les Allemands et la logique d'austérité, tandis que les Verts – fédéralistes – souhaitent «l'Europe des régions». Une différence que la perspective d'un éventuel succès électoral ne saurait effacer ?