Juan Branco n'est plus chargé de défendre Piotr Pavlensky. L'avocat a annoncé ce 16 février avoir été dessaisi par le parquet de Paris de la défense de l'artiste russe, soupçonné d'avoir publié des vidéos intimes attribuées à Benjamin Griveaux. Le parquet de Paris, qui nie toute implication dans la décision, craindrait, selon plusieurs médias, une «collusion» possible entre l'avocat et son client. En sortant du commissariat où est entendu Piotr Pavlensky, Juan Branco a dénoncé sur les chaînes d'information une décision «infondée et inadmissible».
«Le parquet, en une violation exceptionnelle des droits de la défense, a décidé de s'opposer à ma désignation par Piotr Pavlenski dans l'affaire Griveaux», a-t-il ensuite ajouté sur Twitter.
L'acte revendiqué par Pavlensky : un «hommage» aux Gilets jaunes, selon Branco
Le 15 février, l'avocat parisien s'était exprimé sur les motivations de son client, placé en garde à vue avec sa compagne, qui serait la destinataire des vidéos à caractère sexuel. Interrogé par Gabin Formont sur la chaîne YouTube «Vécu», un média tenu par des Gilets jaunes, Juan Branco avait estimé que Piotr Pavlensky avait établi un parallèle entre le quinquennat d'Emmanuel Macron et la politique menée par Vladimir Poutine en Russie. «C'est quelqu'un qui, quand il arrive en France et voit ce qu'il se passe avec les Gilets jaunes depuis le 17 novembre 2018 se dit : "Mais en fait ce régime est en train de devenir le même que celui contre lequel je me battais [en Russie]"», avait déclaré l'avocat militant.
Juan Branco voyait en outre dans l'acte revendiqué par Piotr Pavlensky un «hommage» aux Gilets jaunes victimes de violences policières : «Quelque part, ce qu'il a fait – parce que c'est une dimension sacrificielle très forte – c'est un hommage très fort à ceux qui ont perdu un œil, ont perdu une main, ont perdu un pied, ont été arrêtés illégalement et pour lesquels personne ne s'indignait.» A contrario, Juan Branco regrette que des «dirigeants politiques» soient «capables de larmoyer pour le destin d'un homme politique qui pourtant s'est mis en danger lui-même et s'est comporté de façon absurde».
Juan Branco se disait par ailleurs «très fier» de défendre Piotr Pavlensky et affirmait que si l'ancien candidat à la mairie de Paris s'était retiré de la course aux municipales, c'est parce qu'il avait des choses à se reprocher. «Pourquoi cette personne aurait démissionné s'il n'était responsable de rien, s'il considérait qu'il n'avait rien fait de mal ?», se questionnait-il.
Juan Branco appuie ses dires
Dans une série de tweets publiés le 16 février, peu avant qu'il ne soit dessaisi de la défense, Juan Branco confirmait la thèse de l'acte politique. «L'action de Piotr Pavlenski s'inscrit dans un long engagement politique, qui vise à révéler les points de tension des sociétés où il vit. Travail pour lequel il a reçu l'asile en France, et où il l'a prolongé», écrivait l'auteur de Crépuscule.
«En France, un homme politique tombe parce qu'il a montré son sexe, et non parce qu'il a menti, pillé, éborgné. Pavlenski n'a agi qu'en révélateur de notre absurdité, avec un énorme succès», complétait-il dans un second tweet.
Nouvelle ligne de défense ?
Peu après la diffusion des vidéos à caractère sexuel, Piotr Pavlensky avait affirmé vouloir dénoncer «l'hypocrisie» de Benjamin Griveaux. «C'est quelqu'un qui s'appuie en permanence sur les valeurs familiales, qui dit qu'il veut être le maire des familles et cite toujours en exemple sa femme et ses enfants. Mais il fait tout le contraire», expliquait-il à Libération.
En réponse, Richard Malka, avocat de Benjamin Griveaux, avait qualifié le 14 février cette justification de «grotesque». «J'ai rarement vu personnalité plus cynique. On est dans une imposture absolue, avec des pseudo artistes qui considèrent qu'ils sont dans une dictature et donnent des leçons de morale», déclarait-il sur LCI. Sur France 5, il s'en prenait à Juan Branco : «Là, on a le porte-parole de la Stasi, on a un petit Staline, on a le porte-parole de la terreur et du totalitarisme. Vous êtes mon opposant politique ? Tout est bon.»
La compagne de Piotr Pavlensky destinataire des vidéos
L'affaire Griveaux a pris un nouveau tournant ce 16 février, avec la garde à vue de Piotr Pavlensky et de sa compagne dans l'enquête sur la diffusion illégale des vidéos attribuées à Benjamin Griveaux. Le militant russe avait été interpellé le 15 février et placé en garde à vue dans une autre procédure portant sur des violences commises le 31 décembre. Cette première garde à vue a été suspendue pour permettre de l’interroger sur l’affaire des vidéos.
La compagne de l'artiste controversé est pour sa part soupçonnée d'«atteinte à l’intimité de la vie privée» et «diffusion sans l’accord de la personne d’images à caractère sexuel», dans le cadre de l’enquête ouverte à la suite du dépôt de plainte de Benjamin Griveaux.
Lire aussi : A Paris, La République en marche peut-elle survivre au fiasco Griveaux ?