Dans son rapport annuel, le collectif «Les morts de la rue» a recensé la mort de 612 personnes sans domicile fixe (SDF) sur l'année 2018, soit une augmentation de 15% par rapport à l'année précédente. Des chiffres qui tranchent avec la promesse de «Zéro SDF» faite par Emmanuel Macron, qui s'était engagé en 2017 à «loger tout le monde dignement».
Selon Cécile Rocca, coordinatrice du collectif, néanmoins, ce chiffre est très loin d'être exhaustif. L'organisation recense en effet les décès sur base de signalements de ses partenaires et des médias mais, selon Cécile Rocca, de précédentes recherches auraient montré que le nombre réel des SDF décédés était environ six fois plus important que celui qui a été recensé par le collectif.
Des décès 30 ans plus tôt que ceux de la population moyenne
Les personnes sans domicile fixe dont la mort a pu être recensée par le collectif en 2018 sont en moyenne décédées avant 50 ans, soit «30 ans plus tôt que [l'âge de décès de] la moyenne de la population»
«Les personnes sans domicile meurent plus tôt, en été comme en hiver. Ce n'est pas une histoire de saison, mais les conditions de vie à la rue qui sont en cause», ajoute la coordinatrice du collectif.
36% des décès dus à des maladies
L'analyse des conditions de ces décès dévoile également la violence de la vie dans la rue. Ces SDF sont morts en moyenne à 48,7 ans, contre 82,18 ans pour la population générale. 36% des décès sont dus à des maladies, et 27% sont liés à «des accidents, des agressions ou des suicides». «Les personnes SDF décédées sont majoritairement des hommes jeunes qui ont vécu de longues années à la rue, et qui ont souffert de maladies, d'addictions et de troubles psychiatriques», précise l'étude.
Dans son rapport, le collectif souhaite également attirer l'attention sur les femmes, souvent «invisibles» dans la rue. Elles représentent 9% des décès recensés entre 2013 et 2018, mais ce chiffre est «très probablement sous-estimé». L’analyse montre qu'elles meurent encore plus tôt que leurs homologues masculins, à 45,6 ans en moyenne, le plus souvent d'une maladie.
Une prise en charge dans la continuité
Face à cette réalité, le collectif «Les morts de la rue» réclame des mesures spécifiques comme la mise à l'abri prioritaire, la création de structures d'hébergement non-mixtes, ou encore l'accès aux soins renforcé. Le collectif recommande également de renforcer la continuité de l'accompagnement social et médical de tous, hommes comme femmes. «Certains lieux d'urgence sont devenus des locaux de stabilisation alors qu'ils ne sont pas faits pour ça», regrette Cécile Rocca. «On met à l'abri pendant l'hiver car il fait froid, mais ce qui aide vraiment les personnes, c'est une prise en charge dans la continuité», ajoute-t-elle.