Selon les informations du journal Libération, publié le 22 octobre, qui a eu accès à des notes de la haute hiérarchie policière de Seine-Maritime, la DDSP77 (Direction départementale de la sécurité publique) la gestion des premières heures de l'incendie qui a ravagé l'usine Lubrizol à Rouen, le 26 septembre, aurait été au mieux «erratique». A la suite de cette opération, au moins 53 policiers ont signalé des symptômes correspondant à une intoxication.
Sur place, dans la nuit du 25 au 26 septembre, une brigade anti-criminalité a été primo-intervenante sur le site qui était déjà en proie aux flammes avec des milliers de tonnes de produits chimiques qui brûlaient à l'intérieur du site. Bientôt, 23 policiers se rendent sur la zone du sinistre et au petit jour, ils sont 86 à sécuriser les lieux.
Or l'accident n'a pas été classé au niveau NRBC (risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques) par la Préfecture dans la nuit de l'incendie, ainsi que le mentionnent les notes consultées par le quotidien. Selon cette même source, le directeur départemental de la sécurité publique explique que «les premiers effectifs étaient sur place sans être porteurs de masques». Toujours selon ces notes, peu avant six heures du matin, un message radio a donc assuré aux fonctionnaires de police déployés : «Pas de toxicité des fumées hormis quelques irritations de la gorge.»
Au même moment, des explosions surviennent à l'intérieure de l'usine et le colonel des pompiers décide d'inviter ses personnels à évacuer les lieux en laissant le matériel sur place.
Deux heures plus tard, un major de police qui vient d'arriver sur la zone demande à ce que les effectifs soient équipés de masques NRBC, mais seulement 25 unités de ces équipements sont disponibles. Il est donc demandé aux pompiers de fournir des masques en papiers aux policiers dénués d'équipements. Mais lorsque ces masques en papiers arrivent, il est déjà 10h30.
Début octobre, 53 policiers ont manifesté des symptômes ressemblant à une intoxication, notamment des maux de têtes, des nausées et des étourdissements.
Le secrétaire général d'Unsa Police, Philippe Capon avait alerté sur cette situation dès le 2 octobre au micro de RT France, interrogé à l'occasion de la marche de la colère policière à Paris. Il dénonçait notamment «le manque de considération et de protection» accordé par «l'administration à ses policiers et à ses pompiers, aux gens qui sont les premiers sur le terrain [...] à qui on a fait prendre des risques énormes pour leur santé, en intervenant sans protection ou avec des moyens inappropriés.» Ce manque de considération était selon lui attribuable, selon Philippe Capon, au gouvernement «et pas simplement au ministre de l'Intérieur».
Son syndicat s'était particulièrement inquiété pour les conditions de santé des Compagnies républicaines de sécurité (CRS) déployées sur place lors de l'incendie et avait publié le 1er octobre un communiqué dans lequel il signalait des «nausées, vomissements et autres symptômes d'intoxication» ressentis par les membres des CRS envoyés sur place.