France

Incendie de Rouen : trois jours après, que sait-on ?

Le Premier ministre s'est engagé à faire la transparence sur l'incendie de Rouen du 26 septembre. L'Etat multiplie les communications sur les résultats des analyses, alors que les demandes en faveur de plus d'informations se sont multipliées.

Que sait-on des conséquences de l'incendie de Rouen, trois jours après ? Le Premier ministre Edouard Philippe a assuré, le 29 septembre, que «l'engagement du gouvernement [était] de répondre à toutes les questions et de faire la transparence totale» après l'incendie du 26 septembre de l'usine chimique Lubrizol.

«Pour faire face à l'inquiétude légitime des populations, il n'y a qu'une solution : le sérieux et la transparence complète et totale», a-t-il ajouté lors d'un déplacement à l'université d'été du MoDem dans le Morbihan, alors que les critiques accusant les autorités d'un manque de transparence se sont multipliées ces derniers jours.

Les résultats d'analyses publiés par la préfecture

La préfecture de Seine-Maritime a publié le 28 septembre au soir sur son site des résultats d'analyses liés aux risques de pollution engendrée par l'incendie.

Concernant la qualité de l'air, «les résultats sur les composés organiques volatils sont tous inférieurs au seuil de quantification (quantité trop faible pour être mesurée) et font apparaître un état habituel de la qualité de l’air sur le plan sanitaire, à l’exception de la mesure effectuée sur le site de Lubrizol (présence de benzène)», fait savoir la préfecture.

Au sujet des retombées de suies, générées par l'épais nuage de fumée, «les résultats d’analyses ne mettent pas en évidence de différences significatives entre le prélèvement témoin et les cinq autres sites situés sous le panache pour les HAP (hydrocarbures aromatique polycycliques)», explique l'administration.

Autre sujet de préoccupation des habitants et des agriculteurs : l'état des cultures après le passage du nuage. Selon les autorités, «les productions végétales non récoltées ne doivent pas l’être». S’agissant des productions végétales récoltées avant l'incendie, et susceptibles d’avoir été exposées à la contamination, la préfecture a demandé de prendre certaines mesures. Il est ainsi demandé que soient consignés, sous la responsabilité de l'exploitant «jusqu'à l’obtention de garanties sanitaires», le lait collecté issu d'élevages dont les vaches étaient au pâturage depuis le 26 septembre, les œufs des élevages de plein air pondus et le miel collecté depuis cette date, ainsi que les poissons d’élevage produits dans la zone concernée. 

La préfecture a également annoncé qu'une cellule post-accident technologique, prenant le relais de la cellule de crise, avait été mise en place. Elle est chargée d'assurer le suivi et la gestion des impacts sanitaires et environnementaux. 

Recensement des lieux touchés par des suies

Les services de l’Etat dans les Hauts-de-France «font procéder actuellement» à un recensement des territoires «susceptibles» d’avoir été touchés par des suies dues au nuage de fumées qui a survolé la région après l'incendie, a en outre annoncé l'Agence régionale de santé (ARS) le 29 septembre.

Dans son communiqué, l'agence demande notamment aux habitants qui constateraient «la présence de retombées sous forme de suie» de bien vouloir le signaler aux services de gendarmerie ou de police, ou aux services départementaux d’incendie et de secours.

Les mesures de qualité de l’air réalisées depuis l’incendie ont fait apparaître une qualité de l’air habituelle

Elle recommande de ne pas consommer les fruits et légumes présentant des traces de suie, de porter des gants pour nettoyer, de laver «simplement à l’eau» les fenêtres, mobiliers, jeux extérieurs, de nettoyer les parties du corps qui auraient été en contact avec les suies avec du savon ordinaire, et pour les yeux, de les rincer avec du sérum physiologique. 

L'ARS et la préfecture assurent par ailleurs que «les captages d’eaux de surface destinés à la consommation humaine ont fait l’objet d’une surveillance renforcée», qu'«aucun risque n’est constaté pour l’eau du robinet» et que «les mesures de qualité de l’air réalisées depuis l’incendie ont fait apparaître une qualité de l’air habituelle».

Le nuage a voyagé et traversé la Belgique

Sur internet et dans la presse locale, des témoignages font état de suies à Lille, dans l'Aisne et l'Oise notamment.

Et le nuage ne s'est pas arrêté à la frontière française : la fumée dégagée par l'incendie a atteint la Belgique, a confirmé le centre de crise de Wallonie, le 28 septembre. «Le nuage aurait déjà atteint notre pays cinq à six heures après le début du dégagement des fumées, soit dans la matinée du 26 septembre», précisent les autorités du sud de la Belgique, citées par Le Soir, le 28 septembre. Le quotidien belge rapportait que le nuage se trouvait alors au-dessus des Pays-Bas.

L'enquête et la société civile

Quelques heures après l'incendie du site industriel, une enquête judiciaire avait été ouverte du chef «de destructions involontaires par l'effet d'une explosion ou d'un incendie». Le parquet l'a élargie le 28 septembre au chef de «mise en danger d'autrui».

L'usine appartient au groupe de chimie américain Lubrizol Corporation, lui-même propriété de Berkshire Hathaway, holding du milliardaire et célèbre investisseur américain Warren Buffett.

Depuis l’incendie, des habitants de l'agglomération de Rouen, des partis politiques, des syndicats ou encore des associations de défense de l'environnement ont demandé davantage de transparence sur les conséquences de l'accident, qualifié de «catastrophe majeure» par le préfet Pierre-Henri Durand. 

Plusieurs syndicats, dont la CGT et Solidaires, mais aussi des associations écologistes comme Greenpeace ou France nature environnement, ont appelé à manifester le 1er octobre devant le palais de justice de Rouen, exigeant «une transparence complète».

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