«Ce sont des barbares. Soyez prudents, parce qu'ils ne s'arrêtent plus maintenant» a prévenu le chef de file de la France insoumise lors d'une prise de parole devant des soutiens politiques portant des Gilets jaunes à la marche contre la réforme des retraites le 24 septembre à Paris. Et de poursuivre : «Samedi, si j'y avais été [à la manifestation], ils me tuent. Ils attendent un prétexte.»
Cette sortie sur les forces de l'ordre passe pour une provocation, alors que le patron des insoumis sort de plusieurs jours d'audience au tribunal correctionnel de Bobigny où il comparaissait avec ses consorts pour «actes d'intimidation envers un magistrat et un dépositaire de l'autorité publique, rébellion et provocation» après les incidents survenus lors de la perquisition du siège du mouvement de la France insoumise au mois d'octobre 2018.
Les syndicats de police montent au créneau
Les syndicats de police dénoncent presque unanimement ces propos, appellent la classe politique à les condamner et le ministre de l'Intérieur à engager des poursuites, notamment pour «incitation à la haine». C'est ce que suggère par exemple Denis Jacob, secrétaire général d'Alternative Police sur Twitter :
Contacté par RT France, le secrétaire général de Unsa-Police, Philippe Capon, a pour sa part renvoyé au communiqué émis par sa formation syndicale ce 25 septembre : «Honteux ! Jean-Luc Mélenchon, après avoir il y a quelques mois affirmé la "République c'est moi" réitère avec des propos scandaleux en qualifiant les policiers "de barbares". Ces propos choquants, outrageants, sont à la hauteur des tribulations politiques dont lui seul a le secret et qui sont les seuls propos qui lui permettent d'exister. Unsa-Police rappelle que les policiers exercent un métier difficile, au service des citoyens 24h/24.»
Honte à Jean-Luc Mélenchon qui, en s'en prenant aux policiers, oublie qu'il y a des femmes et des hommes républicains au service de tous
Pour Unsa-Police, les propos du candidat à la présidentielle de 2017 encouragent les plus radicaux à agresser les forces de l'ordre. «Honte à Jean-Luc Mélenchon qui, en s'en prenant aux policiers, oublie qu'il y a des femmes et des hommes républicains au service de tous», accuse-t-il. Unsa-Police demande également au ministre de l'Intérieur de concrétiser son soutien aux forces de l'ordre en engageant des poursuites judiciaires à son encontre.»
Inacceptable insulte à nos forces de l'ordre mobilisées, chaque jour, pour protéger les Français, au péril de leur vie.
Christophe Castaner, a lui-même réagi sur Twitter en demandant à Jean-Luc Mélenchon, non pas de répondre de ses propos devant la justice, mais de présenter des excuses aux policiers : «Inacceptable insulte à nos forces de l'ordre mobilisées, chaque jour, pour protéger les Français, au péril de leur vie. Jean-Luc Mélenchon leur doit le respect, et désormais des excuses.»
Le syndicat Alliance a peut-être trouvé un peu faible la réplique du premier flic de France et a appelé à un rassemblement de policiers devant les locaux parisien de la France insoumise le 26 septembre à 11 heures. En réponse à ce rassemblement, Jean-Luc Mélenchon a déclaré sur son compte Twitter vouloir la protection de la gendarmerie nationale et celle de «témoins populaires». L'insoumis cherche-t-il une confrontation ? : «Demain, un syndicat de police appelle à manifester contre le siège LFI à 11h. Manifestation illégale. Je demande la protection de la gendarmerie. Je crois que la protection de témoins populaires serait décisive.»
Dans un communiqué diffusé sur son site internet ce 25 septembre, le mouvement de la France insoumise a estimé que le syndicat Alliance représentait «l'extrême-droite dans la police nationale» et a qualifié l'appel au rassemblement de ce syndicat de «tout à fait contraire aux usages républicains». La famille politique de Jean-Luc Mélenchon fait également savoir, qu'à son sens, cet événement constitue une «fuite en avant» et «une nouvelle preuve du délitement de l’Etat dont les premiers coupables [seraient] Macron et son gouvernement.»
Comment il ferait sans police s'il arrivait à l'Elysée ? Il donne un mauvais exemple politique
Le communiqué explique ensuite : «Nous demandons que l’intégrité de notre siège, des militant.e.s [sic] qui y travaillent et des élu.e.s [sic] qui pourraient s’y trouver, soit garantie. Il va de soi que des agents issus du même corps que ceux qui appellent à manifester contre nous ne peuvent pas être mobilisés pour cette tâche. C’est pourquoi nous demandons au ministre de l’Intérieur et à son préfet à être placé.e.s [sic] sous la protection de la gendarmerie nationale.»
Le Collectif autonome des policiers d'Ile-de-France (CAP-IDF), contacté par RT France, a pour sa part déploré la séparation opérée par la France insoumise entre la police et la gendarmerie : «Mélenchon veut à la fois nous mettre dos à dos avec les citoyens et la gendarmerie en sous-entendant que la police ne le protège pas en tant que Français. Mais d'une part c'est dangereux parce qu'il oppose deux forces de sécurité intérieure et d'autre part, ce n'est pas un comportement digne de quelqu'un qui prétend accéder à la présidence française. Comment il ferait sans police s'il arrivait à l'Elysée ? Il donne un mauvais exemple politique. Et s'il croit rallier les Gilets jaunes à son mouvement politique avec ça, je crois qu'il se met le doigt dans l’œil.»
Antoine Boitel