France

Co-organisée par une ONG saoudienne, une conférence sur le dialogue interreligieux suscite le tollé

La participation du Saoudien Mohammed Al-Issa à une conférence sur le dialogue interreligieux organisée à Paris passe mal. Cet ancien ministre de la Justice est accusé, entre autres, d'être derrière de nombreuses exécutions capitales.

Ce 17 septembre, le palais Brongniart a été l’hôte d'une «conférence internationale pour la paix et la solidarité» co-organisée par la Fondation de l’islam de France (FIF) et la controversée Ligue islamique mondiale (LIM). Cette organisation est en effet souvent considérée comme le bras diplomatique du royaume saoudien et un instrument de diffusion du wahhabisme.

De quoi susciter les vives critiques de plusieurs responsables politiques, mais également de l'Observatoire national contre l'islamophobie. L’instance liée au Conseil français du culte musulman (CFCFM) avait appelé, quelques jours avant la tenue de l’événement, «les responsables des autres cultes à ne pas cautionner, par leur présence, cette initiative». Selon elle, la LIM incarne un islam «pas représentatif des musulmans de France et qui n'est [pas] compatible [...] avec les valeurs de la République». Du côté de l’Elysée et de Matignon, le silence est de mise. Annoncés dans une première version du programme de la rencontre, Emmanuel Macron ainsi qu’Edouard Philippe se sont bornés à démentir toute participation.

Tous les musulmans en Europe devraient respecter les constitutions, les lois et les cultures des pays où ils vivent

Mais au-delà de la LIM, c’est la participation de son secrétaire général qui suscite nombre de crispations. Mohammed Al-Issa, ancien ministre de la Justice d'Arabie saoudite entre 2009 et 2015, est notamment accusé d’avoir signé de nombreux ordres d’exécution capitale et d’être le «bourreau» de Raif Badawi. Le blogueur a été condamné en 2012à 1 000 coups de fouet et à une peine de dix ans d'emprisonnement pour «insulte à l’islam» et «apostasie». Si des séances de flagellation – par séries de 50 coups – ont bien eu lieu, d'autres ont été annulées à cause de sa santé fragile.  

Mais Mohammed Al-Issa adopte désormais un discours qui tranche radicalement avec les décisions prises par le passé par son ministère : «Nous soutenons totalement le contenu de discours du président français [Emmanuel] Macron en avril dernier quand il a parlé de "l'islam politique"», a-t-il déclaré à l’issue de la conférence.

«Tous les musulmans en Europe devraient respecter les constitutions, les lois et les cultures des pays où ils vivent», a-t-il ajouté. «Ils ne devraient pas accepter l'importation de fatwas et des idées étrangères.» Une soudaine évolution idéologie accueillie favorablement par Ghaleb Bencheikh, président de la Fondation de l'Islam de France. Réagissant au micro de RT France, il a ainsi déclaré : «Il faut savoir reconnaître les changements de cap quand ils sont décidés par des hommes. Les ravages du wahhabo-salafisme sont réels. [Mohammed Al-Issa] en a pris conscience. Je pense qu’il est de mon devoir de faire savoir cette évolution, de l’accompagner et de l’encourager.»

Malgré la polémique autour de cette participation, le grand rabbin de France Haïm Korsia, le président de l’Assemblée des Evêques orthodoxes de France Emmanuel Adamakis ou encore le Grand mufti du Liban Abdelatif Derian ont fait le déplacement. En fin de journée devait être signé un «mémorandum d'entente et d'amitié entre les trois religions monothéistes». Le document comportera des «clauses qui nous font entrer dans l'Histoire», a affirmé Ghaleb Bencheikh.

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