France

S'estimant victime d'un «lynchage médiatique», Rugy se compare à Bérégovoy (EN CONTINU)

Accusé de dépenses excessives, le ministre de la Transition écologique a présenté sa démission. Il a déposé une plainte en diffamation contre Mediapart, qui avait épinglé ses «dîners privés» luxueux, et se juge victime d'un «lynchage médiatique»

Mercredi 17 juillet

François de Rugy évoque une «erreur regrettée et payée au prix le plus élevé et le plus cruel».

Emmanuel Macron a salué ce 17 juillet en conseil des ministres «le sens des responsabilités» du ministre de la Transition écologique démissionnaire François de Rugy «qui l'a conduit à préférer quitter le gouvernement plutôt que d'entraver l'action de la majorité», a annoncé la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye.

D’après une enquête de Mediapart et Ouest-France, François de Rugy avait très régulièrement recours aux chauffeurs mis à sa disposition par l’Assemblée nationale puis par son ministère, notamment pour transporter ses proches.

«Pendant que François de Rugy se rendait pour sa part en train à Nantes, un de ses chauffeurs fonçait en Loire-Atlantique en voiture pour le récupérer en sortant de la gare et le convoyer sur place pendant la durée du séjour», affirme Mediapart, qui précise que l'ancien ministre utilisait également ce moyen de transport pour ses proches.

Interrogé Ouest-France, l’entourage de François de Rugy assure que l'ancien ministre avait recours à ce procédé pour «des raisons de sécurité liées à la menace qui [pesait] sur lui, et du fait que la préfecture de Loire-Atlantique ne [pouvait], sauf exception, mettre de véhicule à sa disposition pour assurer sa sécurité».

Mardi 16 juillet

Le ministre démissionnaire François de Rugy, au cœur de révélations sur des dépenses excessives, s'est comparé à Pierre Bérégovoy qui s'est suicidé en 1993, en évoquant les «mots» de François Mitterrand à l'égard de son ancien Premier ministre «livré aux chiens».

«Comment ne pas penser aux mots de François Mitterrand en hommage à Pierre Bérégovoy», a tweeté l'ancien ministre de la Transition écologique le soir du 16 juillet, en joignant une vidéo du discours prononcé par l'ancien président socialiste lors des obsèques, le 4 mai 1993, de son ancien Premier ministre.

Le 1er mai 1993, le long d'un canal de la Nièvre, Pierre Bérégovoy, 67 ans, s'est donné la mort sans laisser un mot d'explication. Militant autodidacte issu du syndicalisme, devenu Premier ministre de François Mitterrand, il a mis fin à ses jours alors que des suspicions de corruption pesaient sur lui et que la gauche venait de subir une lourde défaite aux législatives.

Les réactions de l'opposition à la démission de François de Rugy sont variées : si les élus ayant pris la parole expriment pour la plupart leur satisfaction, certains estiment que d'autres membres du gouvernement méritent de le quitter.

Nouvelle révélation de Mediapart, ce 16 juillet : François de Rugy aurait utilisé ses frais de mandat de député pour payer ses cotisations au parti Europe Ecologie les Verts (EELV) et réduire ses impôts.

«Nous n'avons aujourd'hui absolument aucune indication tendant à démontrer que François de Rugy a commis des actes qui sont contraires à la justice», a déclaré la porte-parole du gouvernement Sibeth Ndiaye. «Ce n'est pas parce qu'il y a des articles, ce n'est pas parce que des médias le disent, qu'il faut le croire forcément», a-t-elle ajouté, en se disant «très attachée à [...] ce qu'il [François de Rugy] puisse se défendre librement».

Le président de la République Macron accepte la «décision personnelle» de démissionner de François de Rugy.

Si François de Rugy a déposé sa démission, «l'éborgneur Castaner est toujours là et l'embastilleuse Belloubet aussi», a tweeté Jean-Luc Mélenchon. «Steve vaut moins qu'un homard ?», a-t-il ajouté, à propos de Steve Caniço, jeune homme disparu à Nantes pendant la Fête de la musique, au cours de laquelle une opération policière controversée a été menée.

«L'information a été plus forte que la communication», a déclaré à l'AFP le journaliste de Mediapart Fabrice Arfi après la démission de François de Rugy sur qui il a enquêté.

«Mediapart n'a fait que son travail et continuera de le faire», a souligné le journaliste. «La démission du ministre, qui n'appartient qu'à lui et au gouvernement, montre une chose : l'information a été plus forte que la communication». François de Rugy a annoncé avoir «déposé [le 16 juillet] matin une plainte pénale en diffamation» contre Mediapart. 

La vice-présidente du groupe parlementaire La France insoumise (LFI) à l’Assemblée nationale, Mathilde Panot, a estimé «qu’il y avait d’autres choses qui arrivaient après [les révélations de Mediapart], sinon il n’aurait pas démissionné juste avant les questions au gouvernement».

Mediapart, à l'origine des révélations ayant poussé François de Rugy à la démission, a tweeté, peu après l'annonce de ce dernier : «François de Rugy vient de présenter sa démission. Nous lui avions envoyé hier soir des questions en vue de la publication d'une nouvelle enquête. Article bientôt en ligne».

Le ministre de la Transition écologique François de Rugy, au centre d'une polémique sur des dépenses excessives, a annoncé avoir présenté sa démission le 16 juillet au matin au Premier ministre, s'estimant victime d'un «lynchage médiatique» et précisant avoir déposé une plainte en diffamation contre Mediapart.

«Les attaques et le lynchage médiatique dont ma famille fait l’objet me conduisent aujourd'hui à prendre le recul nécessaire – ce que chacun comprendra. La mobilisation nécessaire pour me défendre fait que je ne suis pas en mesure d’assumer sereinement et efficacement la mission que m’ont confiée le président de la République et le Premier ministre. Dès lors, j’ai présenté ma démission au Premier ministre ce matin», a écrit le ministre dans un communiqué.

«Depuis le début de la semaine dernière, Mediapart m’attaque sur la base de photos volées, de ragots, d’approximations, d’éléments extérieurs à ma fonction», écrit-il également, ajoutant : «La volonté de nuire, de salir, de démolir, ne fait pas de doute. Je suis soumis à un feu roulant de questions nouvelles et contraint de parer sans cesse à de nouvelles attaques». 

Le 10 juillet, François de Rugy et son épouse étaient épinglés par Mediapart pour des «dîners privés» luxueux, organisés aux frais de l'Assemblée nationale lorsqu'il en était le président. L’intéressé n'a pas tardé à réagir, assurant que ces réunions faisaient partie de son «travail».

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