D’après des informations publiées par Le Monde ce 11 juillet, une quinzaine de parlementaires de la législature précédente ont fait l’objet, fin 2018, d’un signalement judiciaire de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Parmi eux, Jean-Yves Détraigne, sénateur centriste de la Marne et Jean-Christophe Cambadélis, ancien député de Paris et ancien premier secrétaire du Parti socialiste (PS), sont visés par deux enquêtes préliminaires distinctes du Parquet national financier (PNF) pour détournement de fonds publics en lien avec l’utilisation de leurs indemnités de mandat.
D’après la HATVP, ils ont usé de leur indemnité représentative de frais de mandat (IRFM) afin de financer des dépenses n’ayant aucun lien avec leur mandat. En 2017, le montant de l’IRFM s’élevait à 6 109 euros net mensuels pour un sénateur et à 5 840 euros nets mensuels pour un député. Cette indemnité ne peut être utilisée que dans des cas précis définis par la loi : frais d’hébergement et de permanence, de représentation et de réception, de transport, de communication ou de formation.
Sept députés et huit sénateurs visés
Or, Yves Détraigne aurait fait usage de son IRFM pour des dépenses personnelles interdites par le Sénat depuis octobre 2015, la période étudiée par la HATVP. Avant l’entrée en vigueur de ces nouvelles règles, l’ancien magistrat de la chambre régionale des comptes d’Ile-de-France aurait vidé une large partie du compte bancaire sur lequel était déposé son IRFM, et en aurait viré plusieurs dizaines de milliers d’euros vers des comptes personnels. Sollicité par Le Monde, le sénateur plaide la bonne foi.
De son côté, Jean-Christophe Cambadélis aurait usé de son IRFM pour des dépenses interdites pour une somme proche du plafond d’argent public détourné, d’après les chiffres de la HATVP, soit environ 80 000 euros. Il s’en serait servi, par exemple, pour payer ses cotisations au PS. Or, cette pratique est formellement interdite. L’IRFM n’étant pas soumis à l’impôt sur le revenu et une partie des frais d’adhésion étant déduits de ses impôts, cette méthode confère un double avantage fiscal prohibée par le Code général des impôts. Interrogé par Le Monde l’ancien député de Paris s’est dit «très étonné», précisant que ses cotisations avaient été réglées «sur [son] salaire».
Fin 2018, L'Express avait révélé l'affaire sans donner de noms. Début 2019 Mediapart avait dévoilé le nom de Thierry Solère, député LREM des Hauts-de-Seine.
Au total, ce sont sept députés et huit sénateurs, dont cinq d’entre eux sont toujours en exercice, qui ont été signalés au PNF pour des montants compris entre 20 000 et 80 000 euros. Les signalements de la HATVP ont débouché sur l’ouverture de quinze enquêtes préliminaires distinctes de la part du PNF. Celui-ci ainsi que la HATVP se sont refusés à tout commentaire.