Dans un rapport parlementaire qu'ils présenteront le 6 juin en commission des finances, les députés Jean-Noël Barrot (MoDem) et Alexandre Holroyd (LREM) s'alarment des défaillances de la politique gouvernementale concernant les migrants.
Dans leur ligne de mire, le coût jugé exorbitant de la procédure des expulsion forcées. Et pour cause : celle-ci s'élève à près de 14 000 euros par personne, soit un montant six fois plus élevé que celui d'un retour aidé (environ 2500 euros en moyenne), autrement dit d'un retour volontaire moyennant finance. Au total, ces deux procédures d'expulsion – à la disposition des autorités une fois qu'un migrant clandestin est par exemple débouté de l'asile – ont coûté 500 millions d'euros aux contribuables français en 2018, selon le rapport dont Le Parisien a eu la primeur. Cette même année, 330 000 étrangers en situation irrégulière auraient été dénombrés en France, dont seuls environ 45 000 auraient été expulsés.
Une augmentation de 30 % du pécule alloué permet d’augmenter de 30 % le taux de retour vers certains pays
Les deux parlementaires louent le dispositif des retours aidés – 96% de ceux qui y ont souscrit aboutissent selon les parlementaires à un départ effectif – où l'Etat français prend en charge le transport ainsi qu'une enveloppe comprise entre 300 et 650 euros d'«aide au retour» à destination de la personne expulsable (10 676 clandestins en 2018). Un quart de ces migrants clandestins ayant bénéficié du dispositif se voient également attribuer en complément une «aide à la réinsertion» d'un montant qui s'élève de 2000 à 7500 euros afin de financer des «projets de développement» dans leurs pays d'origine.
Les Albanais, premier contingent des expulsés, toute procédure confondue
Le contingent bénéficiant du retour aidé est composé à 40% de déboutés du droits d'asile, en majorité des Afghans, des Pakistanais et des Irakiens, révèlent en outre Jean-Noël Barrot et Alexandre Holroyd, qui déplorent «un nombre limité de retours aidés organisés à destination des pays africains ou du Maghreb». Le but selon eux : qu'il y ait en France davantage de retours aidés que de retours forcés, à l'instar d'une quinzaine de pays européens. Le député macroniste Alexandre Holroyd s'est targué sur Twitter qu'un «chiffrage aussi rigoureux [...] sur le coût et l’efficacité de la politique d’éloignement des étrangers en situation irrégulière» soit établi «pour la première fois».
«Une augmentation de 30 % du pécule alloué permet d’augmenter de 30 % le taux de retour vers certains pays», fait valoir son collègue Alexandre Holroyd interrogé par le quotidien francilien, pointant néanmoins qu'il faut que ces allocations ciblent certaines destinations pour être efficace. Notamment celles dont les ressortissants ont besoin d'un visa pour rentrer en France, car «sur 110 000 interpellations en 2018, 95 000 personnes venaient de ces pays soumis à visa».
Aujourd'hui, le top 5 des pays d'origine des clandestins bénéficiant du retour aidé est constitué de l'Albanie, de l'Afghanistan, de la Moldavie, de la Serbie et de la Macédoine. En revanche, les parlementaires étrillent le coût des éloignements forcés, qui ont concerné près de 34 000 clandestins l'année dernière. Un coût déterminé en additionnant «30 lignes budgétaires», expliquent-ils. Cette procédure onéreuse – dont le top 5 est constitué de l'Albanie, la Roumanie, l’Algérie le Maroc et le Soudan – est en outre confrontée à deux écueils. D'abord, la mauvaise volonté dont font preuve certains pays, qui rechignent à délivrer des laissez-passer à l'individu que les autorités françaises souhaitent éloigner du sol français. Selon le rapport parlementaire, la Chine a par exemple validé 65% des demandes qui lui ont été faites en 2018, quand la Russie où l'Egypte en auraient autorisé moins de 20%. Certains pays n'ont en effet pas envie de récupérer certains de leurs ressortissants, accuse Jean-Noël Barrot.
En outre, les parlementaires pointent un manque d'effectifs : 450 postes de fonctionnaires seraient ainsi nécessaires dans les centres de rétention administrative afin d'assurer la bonne marche des expulsions. Enfin, les aléas du transport aérien dans le pays d'origine de l'individu expulsable est fustigé par les députés. Refus d'embarquement, vols annulés, durée maximale de rétention de 90 jours : des impondérables concernant lesquels les auteurs appellent le gouvernement à se mettre à la tâche.