Un imam de la banlieue de Rouen a été condamné ce 3 juin par le tribunal de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) à trois ans de prison dont un avec sursis, pour avoir fourni des bateaux pneumatiques à des migrants, afin de leur permettre de rejoindre la Grande-Bretagne.
Lorsque le tribunal correctionnel a annoncé son incarcération immédiate, l'imam s'est évanoui, et sa fille s'est mise à pleurer. Il est également interdit de séjour dans le Nord et le Pas-de-Calais pendant cinq ans. Le tribunal a également condamné à 18 mois de prison, dont neuf mois avec sursis, un fidèle de la mosquée, avec interdiction de séjour dans les deux départements pendant trois ans.
L’enquête a débuté dans la nuit du 27 au 28 mars, lorsque les gendarmes ont découvert des gilets de sauvetage, des pulls mouillés et une embarcation pneumatique échouée sur la plage d’Escalles (Pas-de-Calais). Grâce à l’immatriculation de cette dernière, les forces de l’ordre ont remonté jusqu’à l’ancien propriétaire, qui a expliqué l’avoir vendu à un homme quelques jours plus tôt. Relevés téléphoniques et filatures ont permis d’identifier un Iranien de 39 ans, réfugié politique et imam dans une mosquée de Petit-Couronne, près de Rouen. A son domicile, la police a retrouvé deux bateaux, trois moteurs et une vingtaine de gilets de sauvetage. L’un des fidèles de la mosquée, ressortissant sénégalais de 29 ans, a également été interpellé.
En garde à vue, les deux hommes ont reconnu les faits, assurant avoir agi pour le compte d’un troisième individu, jamais identifié par les enquêteurs. Devant le tribunal, le religieux a évoqué un certain Kamal, pour qui il allait acheter des navires jusque dans un magasin de Deûlémont, à la frontière belge. Parfois, l’imam demande à son «meilleur ami», un fidèle de la mosquée, d’effectuer les trajets. Selon les investigations, les deux hommes auraient ainsi acheté sept bateaux, entre le 27 décembre 2018 et le 30 avril 2019.
Des écoutes téléphoniques et données de géolocalisation accablent l'imam
A la barre, ils ont affirmé n’avoir compris que tardivement que les navires permettaient à des clandestins de tenter de traverser la Manche. «Quand j’ai su, j’ai pensé aux enfants à bord, et je me suis dit qu’il y aurait pu y avoir des morts. J’étais effondré», a déclaré le fidèle. A ses côtés, l’imam s'est dit «honteux». Les migrants entendus ont fait état de sommes pouvant atteindre 10 000 euros ; lui a déclaré que l’acheminement des bateaux ne lui avait rapporté que 1 300 euros.
Des explications «qui ne correspondent pas à la réalité», selon le parquet, qui a rappellé que «les écoutes téléphoniques et la géolocalisation montr[aient] que [l’imam] se déplaçait régulièrement du littoral, à proximité des plages où ont été découverts des bateaux et des migrants». Pointant la «mauvaise foi» des prévenus, l'accusation a souligné l’implication du fidèle, qui «recherche de nouveaux bateaux et décide d’augmenter ses tarifs lorsqu’il comprend que les navires sont destinés aux traversées».
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