L'inquiétude est vive au syndicat national des journalistes (SNJ) après la convocation de deux journalistes au commissariat de Rouillon dans la Sarthe, qui n'avaient selon lui rien fait de plus qu'assurer leur «mission d’information» lors d'un décrochage de portrait d'Emmanuel Macron dans une mairie le 23 mars.
«La gendarmerie vient de convoquer un journaliste et un correspondant local de presse dans le cadre d’une enquête du parquet pour "vol en réunion". Du jamais vu», s'est ému le syndicat. «Pourquoi cette entrave à la liberté d’informer ?», interroge-t-il.
Bruno Mortier, 61 ans, journaliste depuis 1980, avait produit un reportage sur les décrocheurs de portraits d’Emmanuel Macron de la mairie de Rouillon. Selon L'Express, qui s'est entretenu avec lui, il a bien été convoqué en audition libre le 3 avril dans le cadre d'une enquête sur le vol de portrait, «soupçonné d’avoir commis ou tenté de commettre l’infraction de vol en réunion».
Ecrivant pour le Maine libre (groupe Ouest France), il s'était simplement contenté de relater l'action du 23 mars menée des militants d’ANV-COP21 et Alternatiba dans la mairie pour dénoncer l'«inaction climatique» du gouvernement. Ces écologistes ont commencé à décroché des portraits du chef d'Etat français dans les mairies de France le 21 février. A Rouillon comme ailleurs, leur action s'était déroulée dans le calme.
Or, depuis, le maire de Rouillon a porté plainte et le parquet mène l'enquête et s'intéresse de près aux journalistes. Dans ce contexte, un correspondant local d'Ouest France va également être entendu, et le parquet du Mans a confirmé au SNJ qu'une troisième journaliste de la télévision locale allait être convoquée.
La gendarmerie vient de convoquer un journaliste et un correspondant local de presse dans le cadre d’une enquête du parquet pour "vol en réunion"
«Il y a beaucoup d'inquiétude. Imaginez que ce genre de pratiques se multiplient !», a réagi Bruno Mortier auprès de l'Express, redoutant cette confusion entre «acteur» et «observateur». «Ce qui est en jeu, c'est la liberté d'informer», a-t-il ajouté.
Marc Dejean, directeur général du Maine Libre a qualifié l'événement de «surréaliste», confirmant à l'Express que «Bruno Mortier était là-bas en tant que journaliste professionnel, et non en tant que citoyen».
De nombreux journalistes ont dénoncé sur Twitter ces atteintes à la «liberté d’informer», se plaignant des manœuvres d'«intimidation» que de telles procédures impliquaient. Ils ont dit redouter qu'il faille bientôt demander la permission de couvrir les événements.
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