Le sujet de l'impôt sur les grandes fortunes (ISF) a-t-il été exclu des discussions du grand débat national promis par le chef de l'Etat ?
Nous ne reviendrons pas sur les mesures que nous avons prises pour corriger cela afin d’encourager l’investissement et faire que le travail paie davantage
Dans sa lettre aux Français diffusée le soir du 13 janvier, Emmanuel Macron a écrit : «Mais l’impôt, lorsqu’il est trop élevé, prive notre économie des ressources qui pourraient utilement s’investir dans les entreprises, créant ainsi de l’emploi et de la croissance. Et il prive les travailleurs du fruit de leurs efforts. Nous ne reviendrons pas sur les mesures que nous avons prises pour corriger cela afin d’encourager l’investissement et faire que le travail paie davantage.» La plupart des commentateurs politiques et journalistes en ont déduit qu'il faisait par cette allusion, référence à l'ISF et au crédit d'emploi pour la compétitivité et l'emploi (CICE). Pourtant, dans la même lettre, le chef d'Etat assure : «Pour moi, il n'y a pas de questions interdites».
On ne convoque pas tous les Français à un débat en leur interdisant de parler par exemple de l’ISF
L'opposition de gauche est montée au créneau. Olivier Faure, le Premier secrétaire du Parti socialiste (PS), a ainsi un blâmé cette omission sur Twitter. «On ne convoque pas tous les Français à un débat en leur interdisant de parler par exemple de l’ISF», a-t-il jugé. «Il ne veut même pas qu’on en parle ? Imposons-lui un référendum sur son rétablissement», suggère-t-il dans un autre tweet, insérant un lien à la clé pour préparer la campagne d'un référendum ad hoc.
Jean-Luc Mélenchon, le leader de la France insoumise (LFI), accuse le président français dans une publication sur Facebook d'user d'un «vocabulaire technocratique» et «de fausses questions ouvertes» de sorte qu'on ne puisse «remettre en cause la suppression de l’ISF ou la pérennisation du CICE ». «Qui pourrait bien être entraîné par une telle prose faite de tant de ruses et dissimulations ?», interroge-t-il.
Et au final de ce débat qui décidera ? Le Président tout seul
Alexis Corbière, député LFI, estimé que «les thèmes choisis ferment toutes discussions [...] sur l'ISF, CICE». «Et au final de ce débat qui décidera ? Le Président tout seul», fustige-t-il.
Adrien Quatennens, également député insoumis, s'élève lui aussi contre l'absence supposée de l'ISF dans le débat, faisant en outre valoir que seuls «0,14% des assujettis à l’ISF quittaient le pays chaque année».
Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste français (PCF), député du Nord, critique le fait que les mots «pouvoir d’achat», «ISF» «évasion fiscale» «justice fiscale» soient les grands absents du grand débat National. Enfin, Stéphane Peu, député PCF, estime que «la justice fiscale ne sera pas débattue».
Dans son projet de loi de finance (PLF) 2018, le gouvernement avait pris l'initiative de mettre un terme à l'ISF et de le remplacer par un impôt sur la fortune immobilière (IFI). «L'ISF constitue un frein à la croissance des entreprises, tout particulièrement les PME et ETI familiales et il contribue à l'expatriation chaque année de centaines de Français», s'était justifié Bercy dans son projet, dont l'un des objectifs affichés était d'encourager les Français à financer davantage les entreprises pour stimuler in fine l'activité économique. Le recentrage de l'impôt sur le seul patrimoine immobilier exempte de taxes les valeurs mobilières et les placements.
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