La vertu est-elle bafouée par un «nouveau monde» un peu trop attiré par l'argent ? A 34 ans, le député de l'Essonne de La République en marche Pierre-Alain Raphan a été pris la main dans le sac par le magazine Marianne. Selon leur enquête, l'élu a la particularité d'avoir une «passion débordante et intéressée pour l'Azerbaïdjan depuis son entrée au Palais-Bourbon», alors même qu'il ne connaissait ni l'existence de ce pays, «ni son nom» avant son élection.
Nul doute, le fait qu'il soit devenu président du groupe d'amitié France-Azerbaïdjan peu après son investiture a éveillé des soupçons. En effet, l'hebdomadaire rappelle que l'émission Cash investigation du 7 décembre 2015 avait pointé du doigt la «diplomatie du caviar» de ce petit pays du Caucase en France. L'Azerbaïdjan pratiquerait de fait un lobbying intense sur les élites politiques et économiques occidentales, leur proposant des cadeaux ou des sommes d'argent en échange d'un soutien ou pour qu'ils ferment les yeux sur un régime souvent qualifié de dictature.
Mais d'après Marianne, ce ne serait pas la République caucasienne qui aurait tendu la main à un élu cette fois-ci, mais bel et bien Pierre-Alain Raphan qui aurait pris les devants «en toquant à la porte de l'ambassade».
Après son élection à l'Assemblée, il fait donc un premier voyage chez les Azéris avec deux assistants parlementaires, déplacement intégralement financé par Bakou. Contacté par Marianne, les bureaux de la déontologue de l'Assemblée nationale confessent que «[normalement], lors de voyages officiels des groupes d'amitié, les députés sont assistés uniquement par un fonctionnaire de l'Assemblée nationale.» Lors du séjour, le parlementaire rencontre notamment le couple présidentiel. «Visiblement ravi de ce voyage», Pierre-Alain Raphan soumet à son retour un projet aux ambassadeurs azerbaïdjanais. Le député leur suggère alors la création d'une association baptisée Alfa (Alliance franco-azerbaïdjanaise).
Le député veut toucher 230 000 € par mois
Marianne assure avoir en sa possession des documents précisant la nature de l'association. «Une entité aux contours assez flous», note l'hebdomadaire, qui aurait pour but à peine voilé de faire «du lobbying en faveur du régime d'Ilham Aliev à grand renfort de milliers d'euros. Question pécuniaire, Pierre-Alain Raphan demande auprès des Azéris un financement aux alentours de 2,8 millions d'euros par an. En plus de cette coquette somme, il réclame l'embauche de trois salariés permanents à 3 000 euros net par mois pour administrer le site internet de l'association. Interrogé par Marianne, Pierre-Alain Raphan concède : «En écoutant vos questionnements, je comprends que ça puisse interroger…»
Il affirme néanmoins avoir agi «en toute transparence [et que] ses collègues du groupe d'amitié étaient tenus informés». L'hebdomadaire a malgré tout un autre son de cloche venant d'une «source parlementaire de la majorité» qui conteste : «Si j'avais été au courant, ça m'aurait évidemment interpellé.» La déontologue de l'Assemblée affirme pour sa part ne pas avoir eu «connaissance de l'existence» de démarches de fondation de l'entité qui ne pourrait relever que «d'une initiative purement privée du député».