Le 11 septembre, Alexandre Benalla, l'ancien chargé de mission d'Emmanuel Macron mis en examen pour des violences le 1er mai à Paris, a finalement accepté, «contraint», de se rendre devant la commission d'enquête sénatoriale, qui a annoncé qu'elle le convoquerait «prochainement».
Au terme d'une journée de bras de fer avec le Sénat et un début de polémique avec des membres du gouvernement, l'ancien collaborateur de l'Elysée a cédé après avoir fait savoir dans la journée qu'il n'entendait pas être auditionné par le Sénat avant la fin de la procédure judiciaire en cours.
Le garde des Sceaux, Nicole Belloubet, a elle-même assuré le 11 septembre à Tours qu'«il ne peut pas y avoir d'interférences» entre une commission d'enquête et une information judiciaire et de préciser : «C'est la raison pour laquelle Alexandre Benalla n'a pas encore répondu à la commission d'enquête du Sénat.» Réaction immédiate de Philippe Bas, président LR de la commission : «J'ignorais que [Nicole Belloubet] était le conseil juridique de monsieur Benalla».
Alexandre Benalla a pour sa part bien saisi la partition qui lui revenait et entend visiblement la jouer autant que faire se peut. «Afin d’éviter les poursuites judiciaires dont on me menace je vais être contraint de me rendre devant cette commission si une convocation officielle m’est adressée», déplore-t-il.
Je vais venir m'expliquer devant la commission. Mais elle n'a aucun droit. Elle bafoue notre démocratie.
Un refus de se présenter à une telle audience est effectivement puni par une peine de deux ans d'emprisonnement et 7 500 euros d'amende.
Au micro de France Inter, l'ancien collaborateur d'Emmanuel Macron se pose en victime et n'oublie pas d'écorner la commission d'enquête du Sénat : «On me contraint. On m'explique qu'on va m'envoyer des gendarmes et des policiers. Alors, je vais venir à la convocation. Parce qu'on me menace, d'une manière directe. Je vais venir m'expliquer devant la commission d'enquête. Mais elle n'a aucun droit. Elle bafoue notre démocratie.»
Séparation des pouvoirs et secret défense : Alexandre Benalla répondra-t-il aux questions des élus ?
Contacté par l'AFP, l'ancien chargé de mission du cabinet de l'Elysée se défendait déjà : «Je suis dans la transparence la plus totale. Je n'ai rien à cacher. Il n'y a rien qui m'ait fait changé d'avis.» Et de préciser que son refus initial était motivé par le principe supérieur de la «séparation des pouvoirs», déjà invoqué par l'Elysée dans un courrier qui signifiait à des députés une fin de non-recevoir.
Mais Alexandre Benalla annonce aussi la règle du jeu dans un communiqué qui avertit : «Je ne pourrai répondre à aucune question concernant les faits dont la justice est saisie», et de préciser : «Je ne pourrai pas non plus répondre aux questions dont la réponse supposerait de violer le secret de la défense ou le secret professionnel auxquels je suis lié.»
Ce petit marquis m'impose de venir devant lui, sinon il m'envoie la police. Je viendrai devant Philippe Bas
Sur France Inter, il a notamment détaillé : «Je pourrai répondre à toutes les questions qu'elle [la commission] me posera, sauf sur celles qui intéressent la justice. C'est-à-dire toutes les questions sur quel était mon rôle à l'Élysée. Qu'est-ce que j'y faisais exactement. Pourquoi j'étais place de la Contrescarpe. Quel était mon rôle dans la sécurité du président. Ça ce sont des questions, aujourd'hui, que se pose la justice, donc auxquelles je ne pourrai pas répondre, mais j'irai. Parce que monsieur Philippe Bas, je mesure très bien mes propos, ce petit marquis m'impose aujourd'hui de venir devant lui, sinon il m'envoie la police ou la gendarmerie. Je viendrai devant monsieur Philippe Bas. Il a aujourd'hui la possibilité d'exister médiatiquement. Monsieur Philippe Bas me convoque. Je vais venir. Et je dirai ce que j'ai à lui dire.»
Ce sont des petites gens, qui n'ont jamais existé dans le paysage politique français et qui aujourd'hui, à travers Benalla, veulent essayer d'avoir le président Macron.
Décidément pas très tendre avec les parlementaires, Alexandre Benalla a encore estimé que «le Sénat [bafouait], les règles fondamentales de la démocratie française» et s'est inquiété : «Ces gens-là [les sénateurs] veulent s'attribuer des prérogatives. Mais ils sont pas juges ! Ils sont quoi ces gens-là ? Ils sont des politiques. Qui font de la "po-pol", de la petite politique. Ce sont des petites gens, qui n'ont jamais existé dans le paysage politique français et qui aujourd'hui, à travers Benalla, veulent essayer d'avoir le président Macron. Mais ils n'y arriveront pas !»
Les travaux d'enquête reprennent, malgré tout
La date du 19 septembre avait été dans un premier temps annoncée, mais selon les informations de RTL, il s'agirait à présent du 28 septembre.
Interrompues en août, les auditions reprennent le 12 septembre au Sénat. Elles débuteront avec le chef de cabinet d'Emmanuel Macron, François-Xavier Lauch, suivi par le général Eric Bio-Farina, commandant militaire de l'Elysée, déjà entendu en juillet par l'éphémère commission d'enquête de l'Assemblée nationale, puis par Maxence Creusat, commissaire de police à la direction de l'ordre public et de la circulation de la préfecture de police de Paris.