Alors que le gouvernement veut avancer sur la question du Service national universel promis par le candidat Emmanuel Macron avant son élection à la présidence, des voix discordantes se font entendre qui déplorent le coût de la réforme et s'interrogent sur sa validité : après un rapport parlementaire rendu fin avril sur ce sujet, l'opposition dénonçait déjà une idée «farfelue» et «coûteuse».
La porte-parole des Républicains, Laurence Saillet, diagnostiquait alors sur Sud Radio : «Emmanuel Macron ne sait pas comment se dépêtrer d'une promesse de campagne qui [...] lui a permis assurément de gagner quelques points, et il se rend compte maintenant qu'on ne lance pas ça au hasard.»
Combien coûtera cette mesure ? Comment sera-t-elle financée ? Comment seront accueillis les jeunes qui effectueront leur service ?
Autant de questions qui semblent effectivement rester en suspens à l'heure où loger les soldats du dispositif Sentinelle reste très problématique, comme le relevait l'expert en questions militaires Dominique Merchet, dès janvier 2017, interrogé par La Dépêche du Midi.
La facture ? jusqu'à «dix milliards d'euros»
Plus préoccupant peut-être, la facture, qui devait se situer entre deux et trois milliards d'euros faisait déjà tousser dans les rangs de l'opposition, mais le ministère des Armées a également évoqué des chiffres pouvant aller jusqu'à «dix milliards d'euros», selon l'AFP.
Incompréhensible pour les opposants à cette mesure qui pointent le manque cruel de moyens dans des secteurs comme celui de l'enseignement.
C'est du délire de mettre de l'argent là-dedans et pas dans les facs ou les hôpitaux !
Cité par l'AFP, le premier syndicat étudiant, La Fage, fustige «une mesure démagogique». «On peut partager les objectifs fixés : le besoin en mixité sociale et le sujet de l'émancipation citoyenne. Sauf qu'on pense que la méthode est mauvaise», explique son président, Jimmy Losfeld. Et de poursuivre : «Cela fait des années qu'on réclame un milliard d'euros supplémentaires par an pour l'enseignement supérieur et qu'on nous répond que c'est compliqué. Nous n'accepterons pas de voir ce budget sacrifié au profit du service national.» Une lycéenne interrogée par l'agence de presse s'insurge : «C'est du délire de mettre de l'argent là-dedans et pas dans les facs ou les hôpitaux !»
«Ce n'est certainement pas en imposant un dispositif infantilisant et paternaliste qu'on permettra aux jeunes de s'engager davantage», estime pour sa part la présidente de l'Unef, Lilâ Le Bas.
Ce n'est pas en imposant un dispositif infantilisant et paternaliste qu'on permettra aux jeunes de s'engager
Concrètement le rapport parlementaire sur le sujet recommande une application de la mesure pour les jeunes à partir de 15 ans, pour les garçons et les filles, sans distinction. Un service obligatoire mais en plusieurs temps : l'étape obligatoire du dispositif, sur deux fois 15 jours, devrait être effectuée entre 15 et 18 ans au plus tard et une phase de volontariat de 3 à 6 mois pourrait s'y ajouter et se voir, potentiellement, indemnisée. Toujours selon le rapport, les premiers jeunes concernés pourraient l'être dès le deuxième semestre 2019, également sur la base du volontariat.
L'armée devra-t-elle s'occuper de tout ? Les lycéens seront-ils dociles ?
D'où viendra l'argent et qui s'occupera des jeunes Français qui devront mettre quelques semaines de leur vie à la disposition de leur pays ? «Est-ce que c'est les crédits de l'armée qui vont être amputés pour une solution qui va forcément être coûteuse ?» s'interrogeait ainsi Gilles Platret sur LCP fin avril. C'est effectivement l'armée française qui sera sollicitée pour former une partie des encadrants du Service national universel, selon l'AFP. La grande muette restera-t-elle de marbre si cette annonce se confirme ? Affaire à suivre...
Le gouvernement arbitrera avant l'été, selon l'AFP qui prévient également que les «organisations de jeunesse, qui doivent tout juste digérer une réforme du bac récemment annoncée et de nouvelles modalités d'accès à l'université» pourraient ne pas apprécier le choix d'Emmanuel Macron.