Chargé par Emmanuel Macron, en novembre 2017, de proposer un plan de bataille pour les banlieues, l'ancien ministre Jean-Louis Borloo, a remis son rapport intitulé «Vivre ensemble – vivre en grand la République» au Premier ministre, Edouard Philippe, le 26 avril. Mais en dépit du nom du rapport, l'une des 19 mesures envisagées pour «changer la donne» dans les quartiers prioritaires semble s'affranchir des valeurs de la République.
L'ancien ministre préconise de créer une «académie des leaders», afin de donner aux jeunes de ces quartiers un accès aux grands corps de l'Etat : Conseil d’Etat, inspection des finances, Cour des comptes. Une idée louable, dont l'objectif est de lutter contre la «consanguinité» des hauts fonctionnaires de l'Etat, qui sont souvent très éloignés des problématiques liées aux banlieues.
Pour y parvenir, Jean-Louis Borloo propose donc de mettre en place un nouveau concours de la fonction publique, sur le modèle de l'ENA. Ce dernier offrirait aux 500 lauréats chaque année le statut de fonctionnaire stagiaire de l'ENA avec une rémunération équivalente de l'ordre de 1 700 euros brut par mois durant les trois ans de leur scolarité.
Mais il serait donc, selon les propres termes du rapport, réservé «dans un premier temps, aux jeunes des quartiers prioritaires». Ce qui induit sans doute possible une notion de discrimination à l'entrée de ce concours de la fonction publique. Et qu'importe que cette discrimination soit positive, comme le rappelle à juste titre le journal Marianne, l’article 6 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen stipule que tous les citoyens «sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents».
Discutable idéologiquement parlant, cette mesure, si elle venait à être retenue par Edouard Philippe, pourrait également se révéler inconstitutionnelle. Du côté de l'exécutif, on tempère déjà fortement les propositions de Jean-Louis Borloo. Le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux, a qualifié son rapport de «base de travail» tout en rappelant qu'il ne s'agissait que d'un rapport.