Consigne de vote ponctuelle ou rapprochement durable ? Marine Le Pen a pris une décision rarissime pour le Front national (FN) en appelant à voter pour le candidat des Républicains (LR) à l'élection législative partielle de Mayotte qui doit se tenir les 18 et 25 mars prochains, alors que l'île est en proie à une vague de contestation contre l'insécurité et l'immigration.
A Mayotte, a expliqué Marine Le Pen ce 15 mars sur CNews, le FN n'a «pas réussi à trouver de candidat», ce qui [lui] a fait prendre la décision d'appeler les électeurs à voter pour Elad Chakrina, candidat de la droite. Selon elle, le mentor du candidat en question, Mansour Kamardine (LR), autre député de Mayotte et membre de la commission des Affaires étrangères à l'Assemblée nationale où siège également la présidente du FN, aurait «pris tout à fait conscience de la gravité de la situation de l'île». Elle explique en effet l'avoir entendu s'exprimer à l'Assemblée et avoir été convaincue par son discours.
«C'est la raison pour laquelle, compte tenu de la gravité de la situation, je pense qu'il faut passer au-dessus de nos étiquettes partisanes et je souhaite que les électeurs qui m'ont fait confiance à l'élection présidentielle à Mayotte se reportent sur le candidat de monsieur Kamardine», a annoncé la présidente du FN, sans mentionner explicitement le parti Les Républicains ni le nom du candidat Elad Chakrina.
«Les électeurs de Mayotte n'ont pas besoin de consigne de vote. Nous invitons tous ceux qui refusent l'abandon de Mayotte par Macron et le gouvernement à voter pour notre candidat», a immédiatement répliqué l'entourage du président de LR Laurent Wauquiez, sollicité par l'AFP. Si le principe d'alliances avec le FN est rejeté par une majorité de sympathisants LR, selon des sondages, plusieurs de ses membres, comme l'ancien ministre Thierry Mariani, y sont favorables. Les sympathisants frontistes penchent eux aussi, dans leur majorité, pour un tel rapprochement.
Philippot dénonce un reniement
L'ancien bras droit de Marine Le Pen, Florian Philippot, qui dirige désormais Les Patriotes, son propre mouvement politique, a qualifié cette décision de «reniement total». Pour lui, «hors de question de choisir entre un mondialiste LR et un mondialiste PS ou équivalent».
La présidente du FN, qui souhaite rebaptiser son parti «Rassemblement national», avait longuement vanté la nécessité de nouer des alliances lors du congrès du parti le week-end dernier à Lille, notamment pour les élections européennes de 2019. Alors que son parti renvoie dos à dos LR et le PS depuis des années, elle semble donner un signe d'ouverture inédit en direction de la droite.
L'élection, en juin 2017, de Ramlati Ali face à Elad Chakrina avait été invalidée par le Conseil constitutionnel qui avait estimé que la «sincérité du scrutin» avait été «altérée». Elue sous l'étiquette PS, Ramlati Ali était passée dans le groupe de La République en marche (LREM) après son élection. Elle a récemment été mise en examen pour complicité de fraude électorale et clame son innocence.
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