France

Le gouvernement a transmis sa loi contre les «fake news» aux députés LREM... mais elle a déjà fuité

Le Monde a publié des extraits du projet de loi de lutte contre les «fake news». S'il semble inspiré par l'hostilité de l'exécutif vis-à-vis de RT France, son ambiguïté révèle une volonté bien plus large de contrôler l'information sur internet.

Le Monde s'est procuré une copie du texte du projet de loi visant à lutter contre les fausses informations, document communiqué par le gouvernement aux députés de La République en marche (LREM) et qui a manifestement fuité. Le texte est disponible dans son intégralité sur le site NextINpact. Les extraits cités par le quotidien du soir ce 7 mars confirment les grandes orientations de cette loi. 

Comme la ministre de la Culture, chargée de ce dossier – le ministère de l'Information n'existant plus depuis 1974 –, l'avait déjà annoncé dans les colonnes du JDD le 4 février dernier, en période électorale, la justice pourra être saisie en cas de diffusion de «fausses informations». Le texte prévoit ainsi, d'après Le Monde, une procédure judiciaire d’urgence pour les élections présidentielles, législatives, sénatoriales et européennes. Un juge pourrait, sous 48 heures, «faire cesser [la]diffusion» de fausses informations, sans préciser selon quels critères serait évaluée la «fausseté» de l'information en question.

Comment y parvenir sur internet, où les acteurs et canaux de diffusion sont pléthore ? Parmi les pistes, le texte de projet de loi évoque le «déréférencement d’un site[…] ou le retrait des contenus». Il prévoit aussi d'imposer la fermeture de comptes sur les réseaux sociaux.

«Toute personne ayant intérêt à agir» pourra ainsi saisir le juge en référé, outre le parquet, contre une information qu'elle estimerait fausse.

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Les médias étrangers, ou «sous influence», dans le collimateur

Autre point qui a paru important aux rédacteurs de cet avant-projet de loi qui doit encore être débattu et voté par le Parlement avant d'être validé par le Conseil constitutionnel : les médias étrangers.

Selon les extraits cités par Le Monde, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) pourrait désormais refuser une convention à une société contrôlée par un Etat étranger, ou selon les termes plutôt vagues utilisés «sous l’influence de cet Etat [si la chaîne] est susceptible de porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ou de participer à une entreprise de déstabilisation de ses institutions, notamment par la diffusion de fausses nouvelles».

Pour Le Monde, ces dispositions, par ailleurs déjà exprimées par Emmanuel Macron lors de ses vœux à la presse le 3 janvier dernier, visent directement les médias russes. «Ce volet est inspiré par le cas de la chaîne RT (anciennement Russia Today), accusée par Emmanuel Macron de s’être comportée en organe de "propagande mensongère", ainsi que du site d’information Sputnik, tous deux financés par l’Etat russe», rappelle le quotidien. 

Exprimant son intention de combattre «le complotisme et le populisme», Emmanuel Macron a présenté ce projet de loi comme visant à «protéger la vie démocratique». Articulant en même temps des notions telles que «la vérité», ou encore «la liberté d'expression», le président de la République a expliqué que l'Etat souhaitait surveiller la façon dont les informations étaient produites et diffusées.

La proposition de loi devrait être présentée par le groupe LREM à l'Assemblée nationale au printemps 2018, avec une première application lors de la campagne des élections européennes de 2019.

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