France

Colère des kinés et infirmières libérales : privées de congé maternité, elles réclament l'égalité

Les médecins ont droit depuis fin octobre 2017 à un congé maternité, mais pas les professions paramédicales. Une injustice que Pascale Mathieu, présidente du Conseil national de l'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes, a dénoncé à RT France.

Les professions paramédicales telles que les infirmières libérales, kinés et autres métiers avec un statut médical spécial tel que les sage-femmes, dont la profession implique déplacement et pénibilité, n’ont pas le droit aux indemnités de congé maternité. Pourtant les femmes médecins libérales les touchent. «C'est une atteinte au principe d’égalité. Il n’y a pas de raison de hiérarchiser les professions», s’insurge Pascale Mathieu, présidente du Conseil national de l'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes, qui s'est confiée à RT France.

Depuis octobre, les femmes médecins libérales conventionnées et éligibles au congé maternité pourront toucher de 2 066 à 3 100 euros mensuels, pendant trois mois maximum.Ces sommes s’ajouteront à une aide forfaitaire déjà existante, d'environ 3 300 euros.

Les professions paramédicales se sont mobilisées pour être aussi éligibles à ce congé. Une pétition qui réclame l'«égalité de l'aide financière pour toutes les femmes libérales en congé maternité» a été lancée le 18 février, et adressée à la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, et à la secrétaire d'Etat à l'Egalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa. Elle connaît un écho inespéré : plus de 42 300 personnes l’ont signée. La pétition évoque la «consternation» que l'avenant qui accorde les indemnités «ne concerne QUE les femmes médecins libérales et que toutes les femmes représentant le milieu libéral paramédical ont été exclues».

Les kinésithérapeutes reçoivent le même forfait de repos maternel que les médecins, d'environ 3 300 euros, mais seulement 50 euros par jour en plus durant trois mois. Une indemnisation trop faible pour éponger les dettes, cotisations et taxes de leur cabinet durant leur absence, selon Pascale Mathieu : «Quand on ferme le cabinet, on a des charges [...] Ça met notre activité en péril, ça oblige à travailler tardivement au risque de fragiliser notre santé. Pour l’une de mes grossesses, j’avais travaillé très dur, j’ai fini par être hospitalisée à la fin d’une journée.»

Marisol Touraine «obligée de faire un cadeau aux médecins» ?

Une responsable d’organisation paramédicale contactée par RT France, qui a tenu à rester anonyme, a donné sa version de la genèse de l’accord de ce droit : «Quand les négociations sur le projet de loi santé avec la ministre de la Santé Marisol Touraine ont eu lieu, les médecins ne voulaient pas le tiers payant car il empêche de faire des dépassements d’honoraires. Cela a signé un divorce entre eux et la ministre. Pour moi, Marisol Touraine a été obligée de faire un cadeau aux médecins. Lors de la Grande conférence sur la santé en février 2016, en présence de Manuel Valls et de la ministre de la Santé, l’annonce du congé maternité pour les médecins libérales de secteur 1 a été faite. Elle a surpris tout le monde.»

Pascale Mathieu avait elle aussi bondi en apprenant la nouvelle. «J’ai été révoltée par le caractère particulièrement inique de cette décision : soit on donne ce congé maternité à tout le monde, soit on ne le donne à personne», estime-t-elle.

«Lorsque Marlène Schiappa a été nommée, elle a parlé du congé maternité pour tous et elle l’a demandé pour toutes les femmes», poursuit Pascale Mathieu. «J’ai rencontré son directeur adjoint de cabinet le 29 novembre 2017 pour évoquer cette demande. Je pense qu’il y a eu une vraie prise en compte de notre revendication», déclare-t-elle. Pour la présidente du Conseil, la décision prise dans la mandature précédente a créé une injustice, mais aujourd’hui, elle estime «qu’il y a une volonté politique de faire bouger les choses».

Un comité de pilotage devrait être mis en place pour à terme, prévoir le congé maternité. Mais aucune date n’est actuellement fixée pour réparer l’injustice faites aux professions paramédicales.

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