«C'est un degré de violence jamais connu» : venu dans la nuit du 1er au 2 février à Calais sur les lieux d'une rixe entre migrants qui a fait 22 blessés dont cinq par balles, le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb a insisté sur le caractère «inédit» de cette situation.
Décrivant des faits d'une «gravité exceptionnelle», Gérard Collomb a estimé que l'«escalade de la violence» était désormais devenue «insupportable», tant pour les migrants que pour les Calaisiens.
Au moins trois affrontements ont éclaté le 1er février en divers endroits de Calais. Vers 15h30, une première rixe a opposé une centaine de migrants érythréens et une trentaine d'Afghans, non loin du centre hospitalier de la ville où avait lieu une distribution de repas, selon la préfecture. Des coups de feu ont été tirés et le pronostic vital de quatre Érythréens, blessés par balle est engagé.
Puis vers 16h, une deuxième rixe s'est déroulée à environ 5 kilomètres de là, à Marck-en-Calaisis. «Une centaine de migrants africains armés de bâtons ont voulu s'en prendre à une vingtaine d'Afghans», a rapporté le parquet. La police a protégé les Afghans pris à partie par 150 à 200 Erythréens, selon la préfecture.
De nouvelles violences ont éclaté en fin d'après-midi dans la zone industrielle des dunes à Calais, non loin du site de l'ancienne «Jungle». «Le conflit entre Afghans et Africains a toujours été sous-jacent. C'est malheureusement un schéma classique», a commenté une source préfectorale.
Collomb : «Le migrant de base ne peut pas avoir une arme à feu sur lui»
Une situation de plus en plus intenable dont la responsabilité incombe principalement aux passeurs «qui nourrissent quotidiennement violences et rixes», a fait valoir le ministre. Si aucune interpellation n'a pour l'heure été effectuée, Gérard Collomb a soutenu dans l'hélicoptère qui l'amenait à Calais que les gens qui avaient tiré au revolver étaient «apparemment des passeurs». «Ça n'est pas le migrant de base qui peut avoir une arme à feu sur lui», a-t-il poursuivi pour étayer cette thèse.
Le ministre de l'Intérieur a également mis au banc des accusés les associations d'aide aux migrants, qui organisent des distributions de repas plusieurs fois par jour. «J'appelle les associations, et notamment celles qui ont refusé de rencontrer le président de la République à Calais, je les appelle à réfléchir sur ce qui s'est passé ce soir», a-t-il lancé, soutenant que ce type d'attroupement menait à de graves troubles à l'ordre public.
Gérard Collomb a en revanche tenu à défendre les «réponses concrètes» apportées par le gouvernement à la crise migratoire. «J'ai proposé un certain nombre de dispositions : légiférer sur le problème du renvoi des migrants dublinés, et c'est ce qui va se faire avec la proposition de loi Warsmann. Nous nous sommes aussi engagés à réduire le délai de traitement des demandes d'asile à six mois, et c'est ce que prévoit le projet de loi immigration», a-t-il martelé au commissariat de Calais, dans des propos rapportés par Le Figaro. Des mesures insuffisantes pour le maire de Calais Natacha Bouchart, qui lui a demandé que soit intégré dans le projet de loi sur l'immigration «des mesures prévoyant l'expulsion des migrants reconnus responsables de ce type de violences».
Il s'agit du bilan le plus lourd depuis le 1er juillet 2017, lorsque des bagarres inter-ethniques avaient fait 16 blessés, dont un grave. Un an plus tôt, le 26 juin 2016, d'autres rixes avaient fait 40 blessés, dont aucun n'avait été atteint gravement. La dernière rixe entre migrants ayant débouché sur des blessures par balle remonte au 25 novembre 2017, lors d'un échange de tirs entre deux groupes d'Afghans, possible règlement de comptes entre passeurs. Cinq d'entre eux avaient été blessés.