France

«Fils de p*te !» ; «N*que ta mère !», le procès de Jawad de nouveau suspendu

Nouvelle journée d'audience mouvementée au tribunal de grande instance de Paris où se tient le procès de Jawad Bendaoud et de ses co-accusés. Soupçonnés d'avoir aidé les terroristes du 13 novembre, ils ont continué à se donner en spectacle.

29 janvier 2018 : cette quatrième journée d’audience du procès dit de Jawad «le logeur» Bendaoud est consacrée aux questions de la défense. Youssef Aït Bouhlacen, frère d'Hasna Aït Bouhlacen, décédée lors de l'assaut de Saint-Denis, et l'intermédiaire, Mohamed Soumah, sont également sur le banc des prévenus.

Suspectés d'avoir apporté un soutien logistique aux terroristes qui ont frappé les terrasses parisiennes le 13 novembre 2015, ils encourent de lourdes peines de prison.

Au cours de cette journée d'audience, le tribunal se penche également sur la personnalité des prévenus : parcours, personnalité et casier judiciaire de ces derniers sont épluchés.

«Vous répondez avant que je vous pose la question»

L'avocat de Jawad Bendaoud, maître Xavier Nogueras, l'a donc interrogé, en cherchant visiblement à montrer l'ignorance de son client quant aux crimes perpétrés par les terroristes qu'il hébergeait : «Vous avez indiqué que le moment où vous comprenez que les auteurs des attentats viennent de Belgique, c'était dans la cellule de détention.» Jawad Bendaoud rétorque alors : «En garde à vue, oui.»

Puis, maître Nogueras précise : «Dans la conversation avec votre mère, vous allez dire la phrase suivante : "C'est mon local, ce que t'as pas compris, c'est qu'ils sont venus de Belgique et que je les ai hébergés". Vous apportez à votre mère la précision qu'ils venaient de Belgique. Les parties civiles mettent en confrontation cette précision avec vos propres déclarations.» Il demande alors un effort de mémoire à son client : «Pouvez-vous vous souvenir dans quel contexte, dans quel esprit vous êtes au cours de cette conversation avec votre mère et pourquoi vous précisez que les hommes viennent de Belgique ?»

Une perche tendue à son client qui n'a plus qu'à acquiescer pour faire comprendre au tribunal qu'il n'était pas au courant de leur récents crimes à Paris... mais le prévenu s'enflamme et explique qu'il n'était pas au courant que les terroristes du 13 novembre venaient de Belgique. Alors, habile, l'avocat rebondit comme il peut : «Si j'ai bien compris, cette précision "ils viennent de Belgique" n'est pas liée aux attentats.» Jawad Bendaoud se contente alors d'acquiescer.

S'ensuit alors un jeu de questions réponses échevelé entre l'avocat et son client, Jawad Bendaoud en pleine logorrhée n'a de cesse d'interrompre son conseil, qui finit par le lui faire remarquer : «Vous êtes tellement intelligent que vous me coupez l'herbe sous le pied. Vous répondez avant que je vous pose la question.»

«Même François Hollande il a trompé sa femme» : la relation entre Mohamed Soumah et Hasna Aït Boulahcen

C'est ensuite à Mohamed Soumah d'être questionné par son avocat. Il explique alors n'avoir jamais rencontré les terroristes Abaaoud et Akrouh, puis il raconte les circonstances de sa rencontre avec Hasna Aït Boulahcen : «Je la sens un peu tactile, je me dis peut-être c'est une pute, je sais pas, et ensuite je vois qu'elle est bourrée et qu'elle dit que de la merde.»

Mais il est bientôt interrompu par Jawad Bendaoud qui discute avec lui en plein témoignage. La présidente d'audience le rappelle à l'ordre et maître Nogueras reprend son client, puis il s'approche de lui pour le sermonner.

Je me dis peut-être c'est une pute, je sais pas, et ensuite je vois qu'elle est bourrée et qu'elle dit que de la merde.

Mohamed Soumah essaie alors de démontrer qu'il connaissait très mal Hasna Aït Boulahcen, tout en concédant qu'elle essayait de le séduire : «Elle me fait vraiment des appels de phare. [...] Beaucoup d'hommes ont déjà trompé leurs femmes. Même François Hollande il a trompé sa femme.»

Le procès de nouveau suspendu 

Un autre avocat représentant Mohamed Soumah commence alors à questionner son client et lui fait dire qu'il n'a rencontré Hasna Aït Boulahcen que deux fois. Mais, à nouveau, Jawad Bendaoud s'en mêle et interrompt son voisin d'audience en pleine phrase : «Jamais de la vie tu m'as dit ça !» Le ton monte, mais la présidente en a assez entendu et intervient : «Vous arrêtez tous les deux !»

A propos de la personnalité de Jawad Bendaoud, la présidente souligne que l'examen psychiatrique de Jawad Bendaoud n'a fait ressortir aucune «perturbation de la conscience, pathologie psychiatrique, anomalie mentale ou psychique». Mais alors que la séance continuait convenablement, entre sorties drolatiques de Jawad Bendaoud sur ses conquêtes féminines et atermoiements sur ses projets d'avenir, l'audience doit brutalement être suspendue, car les prévenus viennent à nouveau de s'invectiver violemment : «Fils de pute !», crie Mohamed Soumah, «Nique ta mère !», répond Jawad Bendaoud. Les prévenus se hurlent dessus, s'agonisent d'insultes et la salle est évacuée pendant que les injures continuent de pleuvoir.

Maître Nogueras accuse alors les parties civiles de mettre «de l'huile sur le feu» et ses confrères s'en indignent. Cette journée d'audience semblait jusqu'alors être la plus calme de ce procès.